Dimanche
des Rameaux : le 24 mars
La
foule sera déçue par Jésus : au cri de sauve-nous ! de l’envahisseur
et de l’occupant, il restera complètement insensible, jusqu’à entendre
bientôt : Crucifie-le ! Aux marques de reconnaissances et
d’intronisation royale il préfèrera le dénuement et partager son sort avec des
condamnés ordinaires.
Dieu,
en Christ est venu donner du sens, du sel, du souffle à la vie des hommes et
des femmes et non du pouvoir. Dieu en Christ est venu donner une responsabilité
de service des autres et non promettre et décerner la gloire tant attendue des
personnes des nations ou des valeurs qui font vivre les hommes. Le chemin
choisi par Dieu en Jésus Christ n’est pas notre chemin, il vient en quelque
sorte croiser, traverser, parcourir, rattraper le plus souvent le nôtre. Le
chemin de Dieu c’est comme une croisée des chemins entre le sien et les nôtres.
On peut lire aussi la scène des rameaux, comme une croisée des chemins.
C’est la monture de Balaam le prophète
étranger et étrange qui est guidé par son ânesse qui elle sait où il ne faut
pas aller pour maudire Israël mais qui sait porter et supporter le prophète
pour bénir, c’est un animal qui croit qui sait et qui parle. C’est cette ânesse
qui voit que le Seigneur est venu croiser la route et stopper un cheminement un
voyage dit le texte, entrepris à la légère. Peut-on réellement penser que l’évangéliste
Matthieu ne connaissait pas Balaam et son ânesse ? Et qui ici le jour des
rameaux, ne stoppe pas la route comme au temps de Balaam, comme pour
dire : oui il faut y aller ; ce sera dur, n’écoute pas seulement
cette foule, ne dévie pas de ton chemin, tu vois, je te porte jusqu’au bout. Ce
qui rassure Jésus c’est son ânesse et son ânon plutôt que la foule.
La monture n’est
pas brillante, mais elle est solide et elle incarne dans la tradition biblique
une proximité avec les voies de Seigneur : elle est liée à la marche et à la
démanche du Seigneur sur le chemin des hommes ; elle est solide, commune,
familière et proche de la volonté de Dieu même dans ce qu’elle a de plus
surprenant pour les hommes : outil de bénédiction plutôt que de
malédiction, outil de lucidité plutôt que de vanité, instrument de service et
de paix plutôt que de gloire et de conquête.
Détachez-la,
emmenez-les-moi, le Seigneur en a besoin.
Comment ne pas entendre ces paroles de Jésus, les seules paroles qu’il prononça
ce jour-là ; Jésus a besoin d’ânes
plutôt que d’une foule en liesse ; comment ne pas y entendre et les revoir
comme une bonne nouvelle adressée à son Eglise, à ses membres, à nous-mêmes, ce
matin.
L’Eglise
comme ânesse, avec ses ânes et ses ânons, selon Balaam et Zacharie qui sont
appelés à se détacher à être détaché par l’Esprit saint lui-même et par les
Ecritures, oui nous détacher de tout ce qui nous empêche encore d’accomplir
notre service et notre mission et pour devenir
les accompagnateurs opiniâtres du Seigneur :
-
Celles et ceux
qui vont le porter (fonction phorique : théophore ; comme un phare
qui porte la lumière) avec obstination jusqu’en ville, coûte que coûte, -
celles et ceux qui ne seront pas impressionnés par les rumeurs et les
réputations, les caprices de la foule
-
Celles et ceux
qui seront en toutes circonstances les annonciateurs de bénédictions plutôt que
de malédictions et qui porteront la parole du maître comme celle d’un
serviteur.
-
Celles et ceux
qui donneront du sens, du sel, du souffle. Vraiment ce texte et cette fête sont
une affaire d’ânesse et d’ânon : ils sont au centre de cette aventure et
Jésus ne parle que d’eux.
Ce n’est pas une mince
espérance de savoir et de croire que le Seigneur a besoin de nous pour le
porter, l’accompagner, ne pas dévier de la route, s’arrêter parfois pour mieux
avancer encore, ne pas se laisser distraire et être là au moment opportun,
croiser la route du Seigneur, se laisser atteindre par lui, faire au moins un
bout de route ensemble. Dans la parabole du bon samaritain celui-ci mis sur sa
monture, sur son âne le blessé croisé sur le chemin. Nous avons l’habitude de
dire plus facile que le Seigneur nous porte et nous supporte ; et cela est
vrai. Mais ce matin les ânes des rameaux, les ânes du Seigneur nous invitent et
nous appellent à leur ressembler.
Sur
le chemin de Jérusalem, l’ânesse et l’ânon voient s’agiter des palmes des
rameaux qui leur rappellent le désert et ses haltes dans les oasis du temps de
la grande traversée avec Moïse, ils se souviennent de l’exode, de la sortie du
pays des servitudes vers un autre lieu ; ils entendent la foule qui
réclame encore et encore ; Ils marchent pour la première fois sur des
étoffes, des habits ; ils entendent tout cela ils voient, ils sentent tout
cela, mais ils sont loin de penser et de croire encore qu’ils sont en train de
vivre à nouveau un nouvel exode ; cette entrée dans la ville sera suivie
bientôt d’une sortie, d’un nouveau passage, d’une nouvelle Pâques. Mais ceci sera une autre histoire…
Très original Bernard, cette façon que tu as de te mettre à la place des ânes des Évangiles et de les faire parler !
RépondreSupprimerCeci dit, j'ai appris la fonction phorique (même le dictionnaire internet ne connait pas) et elle me va très bien.
Merci pour ces textes (comme celui de Parole pour tous) qui sont vivifiants dans la période trouble et angoissante que notre société et le monde connaissent et vivent.
Amitiés
Edmond et Françoise