jeudi 1 novembre 2012

Le lien de la mort et de la vie ?

Job 19 :

23 Ah ! si seulement on écrivait mes paroles, si on les gravait en une inscription !
24  Avec un burin de fer et du plomb, si pour toujours dans le roc elles restaient incisées !
25  Je sais bien, moi, que mon rédempteur est vivant, que le dernier, il surgira sur la poussière.
26  Et après qu’on aura détruit cette peau qui est mienne, c’est bien dans ma chair que je contemplerai Dieu.
27  C’est moi qui le contemplerai, oui, moi ! Mes yeux le verront, lui, et il ne sera pas étranger. Mon coeur en brûle au fond de moi.
« Moi je sais que mon Goël « rédempteur » est vivant… »
 
Jean 5, 24 :
 
En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui écoute ma parole et croit en celui qui m’a envoyé, a la vie éternelle ; il ne vient pas en jugement, mais il est passé de la mort à la vie.
 
 Aucune religion n’échappe aux questions et aux réponses concernant l’au-delà, l’après. Comme chacun est concerné, pour lui-même comme avec ses proches, chacun apporte fortement et clairement ou timidement ou même en silence, des éléments de réponses à cette interrogation légitime, celle de l’après.
Au fond ce qui compte c’est l’avant et l’après ; et il faut bien dire que l’on s’est souvent servi de l’après pour justifier pour supporter le présent : les religions en ce sens ont été l’opium des peuples au sens où elles ont permis de justifier tous les malheurs et les crises dans l’espérance de jours meilleurs. La récompense, au futur a été un moteur pas toujours efficace d’ailleurs, de l’histoire. Lorsqu’on choisit la mort comme avec les terrorismes par exemple on espère des récompenses vitales dans le paradis, dans un au-delà. La conception de l’au-delà comme possibilité réparatrice du présent est une projection commode mais stérile ; elle peut être aussi un délire mystique qui ont conduit tous les illuminés chrétiens au martyr pour la bonne cause : comme pour hâter « un plus prés » de toi seigneur !
 
Sans aller parcourir les religions anciennes, il se trouve que dans la société civile il en est de même, l’au-delà s’est échappé du présent, le monde magique celui des sorciers, ou bien les autres mondes galactiques sont des manières relativement nouvelles de parler de l’au-delà.
 En Israël, au temps de Jésus, il y a débat et il y aura toujours débat. Certains croient en la résurrection des morts d’autres non. D’ailleurs peu de textes bibliques pour parler de cela, ce seront des textes tardifs et apocryphes qui s’en chargeront. La question de l’au-delà ne va pas de soi et heurte le réalisme, l’incarnation de l’action de Dieu dans l’histoire et dans la vie des hommes. Le Dieu d’Israël est dans la réalité lorsqu’on attend ou espère en l’avenir on voit plutôt une naissance dont on devient le père  ou la mère ou un bout de terre dont on devient l’acquéreur ou le gestionnaire.  L’avenir est un avenir terrestre pour nous ou pour nos enfants ou nos descendants ou nos alliés.
 
Que dit alors l’Evangile ? Dieu est le Dieu des vivants ; les chrétiens restent    fidèles à l’ancienne compréhension hébraïque ; la vie c’est plus que tout, c’est la valeur et la richesse ultime. Oui en ce sens là il y a résurrection comme un surgissement. Il y a résurrection en chaque vie, en chaque moment de l’existence.
La vie c’est aussi la dépendance totale à l’égard des autres comme de Dieu. Devenir en permanence, humain c’est attester ce primat de la vie donnée et reçue plus grande et plus forte que toutes les forces de la mort.
Ce n’est plus la lutte entre la vie et la mort comme le bien contre le mal ;  c’est une sorte d’affirmation que la vie est toujours là et sera toujours là car il y aura toujours quelqu’un de vivant qui devra s’occuper de la réalité de la mort ; seuls les vivants, au fond, s’occupe bien des morts.
Seuls des vivants s’occupent bien ou plus ou moins bien des lieux et des souvenirs ; c’est ce que l’on voit en ce moment dans les cimetières où le commerce de la fleur d’or témoigne d’une vie bien réelle et où le caractère incorruptible de l’or attesté par le chrysanthème s’oppose au caractère corruptible du corps enseveli.
Les évangiles disent aussi : il n’y a pas continuité entre le monde des hommes et le monde de Dieu : il y a rupture. Ce qui vaut aujourd’hui n’a pas cours dans l’au-delà ; c’est la raison pour laquelle toute description et tout calcul pour maîtriser le monde Dieu n’a aucun sens. L’avenir l’au-delà ne dépend pas de nous c’est bien le monde et la responsabilité de Dieu seul ; au fond nous n’y  pouvons rien, ni assurance ni contrôle ni maîtrise. La vie, l’existence humaine n’est ni un destin, une fatalité mais plutôt la possibilité d’une préoccupation des moments de la quotidienneté et un essai dé-préoccupation de l’au-delà.
Nos calculs et nos pronostics ne sont pas les calculs et les probabilités de Dieu.
Mais en disant cela L’Evangile ne répond pas complètement à la préoccupation métaphysique des humains. Mais est-ce bien utile de répondre ? Il faudra sans doute l’entendre cette préoccupation et trouver des mots pour l’exprimer et l’apaiser parfois.
« Moi je sais que mon Goël rédempteur est vivant… »
« Celui qui écoute ma parole et croit en Celui qui m’a envoyé, a la vie éternelle… »
  • Job d’abord et Jean ensuite. Job sait de quoi il parle, il sait ce qu’il est en train de vivre. Il est l’humain, l’archétype humain dans sa radicalité. Pour lui, la mort ce n’est pas seulement après c’est bien au cœur de sa vie ; dans son corps, et dans son cœur dans ses oreilles, car il doit subir les bons discours de ses amis, qui expliquent et justifient ce qui lui arrive. Job est assailli de maladies mortelles et il est assailli par toutes sortes de croyances et les religions qui viennent dire leur solution, leur réponse.  
Au fond les traditions bibliques n’exposent pas de façon systématique et organisée ce que serait le dogme à croire à accepter au sujet de l’au-là. Il n’y a pas un condensé un résumé des réalités qu’il faudrait accepter et croire. Les Ecritures comme toujours comme pour nous aider de façon humaine et divine à la fois, nous raconte une histoire ; comme si le récit valait mieux que des articles de foi ; comme si l’histoire disait à sa manière un aspect particulier qu’il est intéressant de recevoir non pour croire dans l’après mais pour espérer pour aujourd’hui et sans doute demain.
 Dans sa souffrance et dans sa mort qui gagne sans cesse, le personnage de Job ne croit pas, il sait ; il sait que Dieu est vivant. Qu’il n’est pas mort, lui. Lui va sans doute mourir mais sa certitude pour l’au-delà c’est encore la présence d’un Vivant. Il sait que son Goël son défenseur, son aide, son avocat : le Nouveau Testament avec Jean dira son Paraclet ; il sait la présence non l’absence ; il sait la réalité d’une personne vivant et non la présence de la mort représentée. Il sait qu’il aura un entretien, une rencontre, il sait qu’il va au devant d’une parole avec sa parole mortelle et souffrante. Il est bientôt sans parole, il va rencontrer une parole non plus explicative et justificative mais une parole présente, une parole de Celui qui est là, Dieu lui-même comme la présence d’une Parole.
·         Jean aussi est là. La vie éternelle est un présent sous la forme d’une parole qu’il s’agit d’écouter et de recevoir et sous la forme d’une foi, d’une confiance en quelqu’un qui a envoyé quelqu’un d’autre. Jésus lui-même n’est pas une fin en soi il n’est pas l’ultime qui réside en celui qui l’a envoyé.
 
Ici nous trouvons l’affirmation centrale celle de la foi en celui qui a un projet pour quelqu’un. Dieu a un projet pour lui comme pour moi comme pour toi. De même qu’il y a toujours un semeur qui sortira pour semer de même il y a toujours quelqu’un qui a un projet pour quelqu’un d’autre. La présence du projet c’est Dieu lui-même qui a un projet pour moi comme il a un projet pour chacun comme il a un projet pour Jésus le Christ.
 La relation entre le Père et le Fils dans l’évangile de Jean va dire de façon continue, que la relation et la dépendance sont essentielles dans la transmission de la vie comme dans la transmission d’une Parole de Vie. L’écoute de la Parole et la relation avec celui qui envoie sans cesse fait passer de la mort à la vie.

Voilà une espérance nouvelle, neuve et simple comme une source d’espérance : il y a toujours quelqu’un pour nous, pour moi comme pour toi. Ces remarques de Jésus dans l’évangile de Jean se situe entre le signe de Cana et la multiplication du pain qui sera appelé le Pain de Vie.  Il y a toujours quelqu’un visible ou invisible qui s’occupe des convives, qui renouvelle les habitudes, qui donne en abondance et qui partage sans modération !
 
 
Notre visite des cimetières peut se faire de manière simple et tranquille ; se souvenir n’est pas un détail de notre vie mais sans doute une réalité essentielle. Si nous nous souvenons nous pouvons croire aussi que Dieu se souvient de nous.
Notre vie comme notre mort sont et seront dans la mémoire de Dieu lui-même ; c’est sans doute aussi l’au-delà. Etre tourné vers et croire en celui qui a un projet pour nous et qui nous adresse une Parole de Vie ; croire qu’il est le Vivant quoiqu’il arrive, reste notre seule et ferme espérance ; tout le reste, tout ce qu’on raconte, tout ce que l’on fabrique, toutes les descriptions des religions ne sont que littérature plus ou moins bonne !
Le pain et le vin de la Cène restent les signes les plus réalistes d’une vie et d’une mort dans lesquelles réside à tout jamais une espérance pour le temps et pour l’éternité.

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