mercredi 20 mai 2020

Ascension

Devant nous l’Ascension et Pentecôte, derrière nous, Pâques ! L’Eglise vit cet entre-deux avec deux risques à éviter :

Celui de se replier et de s’enfouir, disparaître aux yeux de tous. Bref confinée réellement ! Le Maître n’est plus là, faisons comme lui, devenons une réalité une communauté invisible qui se rassemblera comme se rassemble des initiés qui auront accès aux codes et au mystère du Ciel ; c’est la communauté des purs et des élus qui refusent la relation et la compromission avec les autres comme avec le monde. L’Eglise de Jésus Christ n’a rien à voir avec tout cela car le message du Christ se déploie dans une longue chaîne d’interprétation faite par des hommes et des femmes dans le concret de leur histoire aux prises avec la réalité du monde. L’Eglise de Jésus Christ est une Eglise de la vie, elle ressemble à une communauté historique et précise qui rencontre et accueille mon histoire, ma vie, mon existence toujours mystérieuse mais toujours concrète.

Le deuxième risque est celui qui est contraire au premier et qui a été longtemps parcouru par le christianisme à divers moments de son histoire : non plus le repli mais la présence exubérante qui occupe toute la place. Le Christ n’est plus là peut importe nous sommes là et nous allons le remplacer. C’est l’Eglise qui comble qui remplace qui tient lieu ; ce sont les croyants qui ne font plus de différence entre privé et public entre intérieur et extérieur entre cités des hommes et cité de Dieu pour le dire avec St Augustin. C’est l’Eglise où le Grand Inquisiteur sait de la part de Dieu et mieux que lui, ce qu’il faut faire : en général extirper l’hérésie et les interprétations hétérodoxes.

La communauté chrétienne qui vit sous le signe de l’Ascension est celle qui a derrière elle la croix et la résurrection et devant elle : Pentecôte ; c’est la communauté du souvenir de l’espérance et de l’attente.

Une communauté du souvenir, non pas une communauté qui cultive les manifestations du souvenir de son histoire glorieuse ; mais une communauté de foi qui sait d’où elle vient ce qu’elle doit aux témoins souvent martyrs de la foi qui on transmis contre vents et marées leur espérance, leur compréhension et leur vision du monde et de la vie. Pour nous, le Maître n’est plus là mais ce qu’il a dit ce qu’il a fait va devenir peu à peu important pour chacune et chacun. 

Une communauté et une foi arrimées à une espérance. C’est une manière de dire aussi l’avenir. Nous ne sommes pas à la fin d’une trajectoire fatale. Le Maître n’est plus là, mais tout ne s’achève pas tout ne s’écroule pas car tout ou presque reste encore à vivre. L’espérance c’est la certitude que quoique qu’il arrive, demain aura lieu. On interrogea dit-on un jour M. Luther : si la fin du monde arrivait demain, que ferais-tu ? "Je planterai aujourd’hui un pommier" ! Pas très religieux, mais ferme assurance et foi enracinées dans l’espérance. Celle de la vie, espérance que notre trajet terrestre est conduit et guidé de bout en bout comme celui du Christ.

Enfin une communauté en attente : faire mémoire, être et vivre dans et de l’espérance apportée en Jésus Christ c’est aussi l’attendre. « Pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel ? Celui qui vous a été enlevé viendra de la même manière que vous l’avez vu aller vers le ciel ». On sait que de nombreux groupes chrétiens ont tout misé sur ce retour. Nous ne savons pas, nous ne faisons pas de prévision comme pour mieux vivre l’attente qui reste calme et sereine.

Ainsi nous croyons que Dieu conduit et continue de conduire le monde comme notre vie. Il a été là, Il est encore là, et Il sera là. Lui dont nous avons à nous remémorer les gestes et les paroles, nous souvenir pour les rendre vivants et présents. Lui qui place au cœur de notre vie une espérance de vie semblable à sa vie sur la terre des humains. Oui la communauté des croyants est en attente comme le veilleur attend l’aurore, comme l’ami attend l’ami, comme Dieu lui-même attend avec patience et bienveillance.

L’Ascension est un départ, qui laisse des témoins étonnés et joyeux, toujours aux prises avec la tentation de l’enfouissement ou de l’arrogance ; le départ de l’Ascension laisse toute sa place à la foi en Christ qui nous invite à nous souvenir, à espérer sans cesse et à l’attendre avec fidélité.

 


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