Pâques 12 avril 2020
Esaïe 55, 1-13. Actes 10, 34-43 et Luc, 24,
1-12
« Rappelez-vous comment il vous a parlé quand il
était en Galilée ; alors elles se rappelèrent ses paroles, elles revinrent
du tombeau et rapportèrent tout cela au Onze et à tous les autres ;
C’étaient Marie de Magdala et Jeanne et Marie de Jacques ; Les autres
compagnes le disaient aussi aux apôtres. »
La
fête de Pâques est un exode, c’est un exil ; c’est un passage et une
sortie ; c’est une libération, c’est une sortie de prison ; c’est une
naissance comme éblouissement ; la fête de Pâques ce sont toutes les
forces de vie qui entourent et font diminuer toutes les forces de mort.
Pâques
c’est la foi en une création qui fait vivre et qui s’exprime par la rencontre
vitale de tous les autres ; c’est la célébration du premier jour ;
dans le déroulement inexorable des semaines et des jours, Voici l’arrêt et
l’étonnement au cœur de ce premier jour de ce temps nouveau, neuf, comme une
nouvelle étape de vie pour des témoins surpris. Tout ne se déroule pas sans
fin, tout ne coule pas comme le disaient les Grecs ; il y a des jours trop
longs et des moments usés et des jours et des moments neufs ; il y a des
temps qui inaugurent, il y a des temps de ressaisissement, de recueillement et
de récupération.
Après
et avec l’échec et la capitulation voici venu le temps de la récapitulation,
avec et après le temps de la mort voici venu celui de la vie.
Les
auteurs évangéliques et Luc en particulier, en écrivant dans la foi, les récits
de Pâques ont été confrontés à une grande difficulté fondatrice du
christianisme et de la foi elle-même : il fallait montrer et dire la bonne
nouvelle de la vie, la bonne nouvelle de Jésus le Christ vivant en tenant
compte à la fois de la réalité, de l’objectivité et d’un certain
réalisme : il fallait qu’il n’y ait pas de doute : le Vivant le
ressuscité, c’était bien Jésus de Nazareth, le crucifié ; et c’est alors
l’insistance dans les textes des mentions de mort, celles des aromates celles
des bandelettes, celle de la pierre, celle du corps et du tombeau. A ce niveau
là il fallait affirmer que l’action de Dieu et son projet concernent bien Jésus
mort : on parlait bien du même. Mais en même temps, il fallait exprimer et
annoncer que la résurrection et Pâques ne ressemblaient en rien, n’avaient rien
à voir, avec un joyeux happy end, une fin heureuse, une bonne conclusion à un
épisode de la vie mouvementée et tragique.
La
foi de Pâques tient en ces deux perspectives : réalisme de la mort et du
tombeau et en même temps béance, vacuité de ce tombeau désormais sans objet,
sans corps. Absence et vide qui laissent place à des mots à des paroles qui
vont atténuer le choc et la brutalité de cette disparition qui vont orienter la
foi et l’espérance en train de naître. Le corps mort de Jésus n’est pas objet
de foi ni d’adoration, seul le corps absent seules les paroles vivantes fondent
la foi de Pâques.
En
ce premier jour de la semaine nous sommes invités à nous mettre à l’écoute de
cette foi de cette confiance en train de naître : la foi de Pâques,
l’espérance vitale et dynamique qu’elle contient a pour cadre le réalisme de
l’existence humaine qui s’exprime par le vide la béance et l’absence dans un
tombeau désormais inutile car il ne répond plus à sa fonction.
Dieu
intervient dans le cadre et non hors du cadre de l’existence humaine et son
intervention peut s’opérer sous le signe du vide et de l’absence habités par
des paroles vivantes pour des personnes en train de vivre et de revivre.
Ce
sont bien des personnages de chair et de sang des êtres qui nous
ressemblent ; ce sont des hommes, mais surtout des femmes apeurées et
meurtris qui vont découvrir l’efficacité de Dieu l’efficacité de sa parole, la
réalisation de ses promesses sur le lieu même de l’absence et du vide. Jésus
n’est plus là mais finalement qu’importe, les marques, les traces, l’écho, le
souvenir de son passage, de sa vie de ses actions sont ce jour-là tellement là,
que sa disparition son éloignement va se transformer en dynamisme nouveau, en
responsabilité nouvelle, en nouvelle marche, nouvelle parole en semaine
nouvelle, en création nouvelle. Il n’est plus là ! mais qu’importe, nous
sommes là ; les disciples sont là porteurs de son espérance, porteurs de
ses réalisations à vivre, annonciateurs de son projet de vie. Le premier jour
de la semaine, le jour de Pâques, soudain les disciples déconcertés et affolés,
découvrent qu’ils deviennent utiles et nécessaires, qu’ils sont les agents
préférentiels et agréés de la vie de Jésus.
Le
miracle incompréhensible de Pâques réside là tout entier. L’action souveraine
de Dieu est à jamais inséparable de la vie de ses témoins. Pâques n’aurait
aucun sens et nous ne serions pas là pour le célébrer encore, si les témoins du
premier jour de la semaine ne s’étaient pas mis à l’œuvre pour annoncer de
grand bouleversement de grand déplacement :
- Le tombeau de Jésus n’est pas le bon lieu, il nous
est inconnu il échappe à toutes nos tentations et nos envies de figer dans
l’espace et le temps la réalité de Pâques.
- On ne
parlera plus ce jour là de Jérusalem et de la Judée lieux des pouvoirs
et de la gloire fragile. – On ne parle plus du temple, lieu du sacré et de
pèlerinage
- Le jour
de Pâques seule la Galilée
compte, lieu de la mouvance et des déplacements de Jésus, lieu des rencontres
avec celles et ceux qui en manquaient. Là où Jésus avait rencontré les
paralysés de l’existence, là où il avait enseigné. Cet espace et ces moments
historiques acquièrent soudain une dimension universelle et éternelle. Ce qui
était un coin de terre devient figure du monde entier. Dans l’évangile de Luc
la Galilée devient l’espace de la résurrection. Rappelez-vous comment il vous a
parlé en Galilée. Ce qui s’y était passé et dit devient ce qui se passera
toujours et partout.
La foi de Pâques prend figure de l’épopée galiléenne. Le passé soudain devient présent qui est orienté vers un avenir à vivre, non à répéter mais à reconstruire, nos vies, nos histoires nos espaces. Les frontières sont repoussées. La fête de Pâques grâce à Dieu c’est l’élargissement de tous les lieux étriqués, même ceux que Jésus avait parcouru. Celui qui est vivant vivifie les espaces les tempos et les moments il vivifie celles et ceux qui désormais auront pour raison de vivre l’annonce de cet élargissement possible et indispensable.
Des
femmes d’abord qui reçoivent une mission une identité elles qui découvrent
l’impossibilité de rencontrer Jésus rencontrent deux hommes vivants parlant
disant le sens et la perspective nouvelle. Celui qui est mort n’est plus là,
mais faites de la vie en Galilée l’affaire de votre vie, allez le dire et le
faire. La peur la crainte le visage de la tristesse se transforment peu à peu
en message porteur de vie et d’espérance tellement porteur de vie et de
simplicité que les hommes y voient de la folie.
Des
hommes ensuite. Deux hommes ont pris la ^place du corps mort de Jésus. Seul Luc
a cette audace, les autres parlent d’anges ! Le premier jour de la semaine
ce que Jésus aurait pu dire des hommes découvrent qu’ils peuvent le dire et le
faire, ils comprennent que le Vivant c’est bien pour des vivants. Ils
comprennent que la Galilée c était important, tout y était contenu : la
croix, les rencontres les signes, la vie. Désormais il faudra vivre de tout
cela. Les Onze et les autres et Pierre en particulier reçoivent de la part de
Dieu, par des femmes et des hommes neufs leur ultime enseignement. Certes ils
iront, Pierre ira vérifier la béance et la vacuité du tombeau, mais il faudra
repartir avec le souvenir puissant de la Galilée et de la vie.
Pâques n’est pas une théorie c’est la
rencontre d’une possibilité de vivre autrement et vraiment. En ce premier jour
d’une semaine nouvelle nous sommes appelés à nous mettre à l’écoute des témoins
de Pâques : ouverture d’un tombeau, disparité, parole et souvenir,
découverte que sans témoins e train de se mettre en marche Pâques risque d’être
une pseudo réalité magique. ; le Vivant ne joue pas avec la mort il dit le
primat de la vie, il propose dans l’étonnement une parole et une action pour
des hommes et des femmes celles de devenir des disciples des annonciateurs des
témoins d’un monde transformé et transfiguré pour leur propre vie pour la vie
des hommes et des femmes autour de nous.
On
ne peut pas vivre et croire Pâques en restant immobile dans nos vies nos
conceptions nos orientations nos projets. Seuls des hommes et des femmes
ressuscités et grâce à Dieu en train de le devenir reçoivent pleinement
l’annonce, la force et la joie de ce jour. Ressusciter c’est faire mémoire, c’est
être rendu capable de faire mémoire des gestes et des paroles de Jésus lorsque il était en Galilée. Nous avons tous des Galilées personnelles, nos vies
et nos habitudes à revisiter, la rencontre avec la Galilée de Jésus va élargir
nos espaces et les parcourir d’espérances à vivre.
Alors,
rappelez-vous comment il vous a parlé lorsque il était en Galilée !
Le
pain multiplié et le vin en abondance comme à Cana, sont partagés ; ils sont
le souvenir vivant de cette vie et de cette mort transfigurées, à recevoir et à
annoncer.
En les partageant puissions-nous là où nous sommes et comme nous sommes, découvrir des signes de résurrection. Grâce à Dieu Il est Vivant pour que nous vivions nous et tous les confinés de la terre ! A tous les confinés de la Vie !
En les partageant puissions-nous là où nous sommes et comme nous sommes, découvrir des signes de résurrection. Grâce à Dieu Il est Vivant pour que nous vivions nous et tous les confinés de la terre ! A tous les confinés de la Vie !
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