Lors du culte du 15ième anniversaire de l'Eglise protestante francophone de Moscou :
Les photos de la célébration
Les photos de la célébration
1 Pierre 2, 4-10 : « Vous aussi vous êtes
comme des pierres vivantes ! »
Nous voici rassemblés de ce grand et bel
édifice ; ici à Moscou comme dans bien d’autres capitales d’ailleurs les
constructions religieuses ou publiques veulent marquer les yeux et les esprits
et raconter une grande histoire celle des peuples et des nations.
Nous sommes rassemblés toujours quelque part dans
des lieux, construits, habités, loués, prêtés ; ils sont à nous et à
d’autres. Nous sommes ici grâce à notre frère Braeur et sa communauté qui nous
accueillent pour ce temps particulier de louange et de reconnaissance pour tout
ce qui a été fait pour la vie de cette communauté luthérienne francophone,
appelée à devenir sans cesse une pierre vivante parmi d’autres pierres
vivantes.
Depuis que l’humanité a quitté l’âge de pierre, elle
n’a pas cessé de construire, d’édifier, de construire. Le travail de la pierre,
son usage, sa complexité ont été les signes visibles d’une humanité qui s’est
développé en construisant et en détruisant. La pierre c’est ce qui permet
l’édification et en même temps ce qui permet la destruction : pierre sur
pierre jusqu’à la pierre d’angle c’est le sommet de la construction et le
caillou de la fronde comme le boulet du canon ou de la bombarde sont les
premiers éléments les premières armes de la guerre. Il est un temps pour tout disait
le sage : un temps pour amasser des pierres et un temps pour lancer des
pierres.
Les pierres sont anciennes ; les grandes
civilisations d’Assour à Babylone, des statuts géantes de l’Asie en passant par
les ziggourats babyloniennes ou les pyramides d’Egypte, les routes, les arcs de
triomphe, les aqueducs romains sont notre héritage direct comme le sont aussi
les théâtres ou les amphithéâtres grecs ; la vie des hommes est lisible dans
les pierres.
On pourrait dire que nos cultures et civilisations bien
au-delà de nos individualités de nos personnes, sont de vastes lithographies
c’est à dire littéralement des écrits sur de la pierre ou bien encore des
pierres écrites. Même si nous ne les comprenons pas toujours comme les pierres
dressées et sculptées de la civilisation celtique par exemple.
Dans cette permanence et cette priorité de la pierre
construite détruite et reconstruite, apparaît le désir des hommes de se
montrer, forts et puissants et en même temps signifier qu’il est utile
important et nécessaire de durer. La pierre dans toutes ses manifestations
apparaît comme le signe d’une espérance et d’une forme d’immortalité ou comme
un gage contre l’oubli, un signe de mémoire, ce que deviendra ensuite le
mémorial. Malgré l’usure ces monuments sont l’expression d’une volonté d’être
là longtemps comme signe et gage de vérité ; les cathédrales qui
deviennent des lieux de visites sont de cet ordre, un témoignage d’une foi
d’une histoire passée et qui viennent à notre rencontre.
Le peuple d’Israël est le seul peuple ancien qui
n’est pas visible dans ces constructions et ces monuments. Comme s’il n’avait
pas tout misé sur ce genre d’apparence ! Le mur du temple est particulièrement
récent et n’est pas un monument : il ne se compare pas aux pyramides d’Egypte.
Même si « un jour dans tes parvis en vaut mille ailleurs » et même si
dit le psalmiste déjà : « j’ai choisi de rester au seuil de la maison de mon Dieu et de loger
sous la tente des infidèles » (Ps. 84,11) Le peuple d’Israël comme les
autres a été fasciné par la capacité constructrice des hommes. Mais la
destruction a été plus forte et a été curieusement et étonnamment fondatrice de
nouvelle identité de nouvelle manière de vivre ensemble : non plus autour ou dans le temple mais
autour et dans une parole à lire à comprendre à prier à vivre.
« Le Seigneur lui seul est mon rocher, ma
forteresse, ma citadelle, mon asile protecteur ».
On pourrait dire encore que la captivité égyptienne
était celle de l’épreuve de la pierre à construire à édifier pour la gloire du
pharaon ; casser des cailloux a toujours et partout signe d’humiliation du
vaincu pour construire la gloire du vainqueur. Le peuple d’Israël ne se
remettra jamais de cette épreuve de la dureté et son souvenir sera toujours
présent.
De plus et comme pour renforcer ce souvenir
difficile les tables de pierres celle de la loi divine directement écrite
devront être brisées et détruites comme pour dire que cette loi fondatrice est
gravée ailleurs que dans des pierres mais dans des vies dans des cœurs dans des
histoires personnelles et communautaires. Bref, même les parvis, les degrés,
les colonnes, les murs impressionnants, de tout cela, il ne restera pas pierre
sur pierre.
"Tu es Petros et sur cette Pétra, c’est le latin de
roc et rocher, j‘édifierai mon église" (Matth 16,18) Non pas je pétrifierai mon
église, ni sur un trône ni dans un tombeau, ni par des rites ; mais je la
rendrai vivante comme le miracle d’une pierre vivante. Mon Eglise ne sera pas de pierre car elle risquerait de se lézarder
sans cesse.
Etrange aventure de ce mot et cette réalité de la
pierre. Jésus va s’en servir pour dire une nouvelle loi ou pour renouveler la
loi de Dieu ; vous pouviez lapider et bien désormais c’est fini. Que celui
d’entre vous qui est sans pécher lui jette la première pierre ! Et le cercle se
brisa et ils partirent les uns après les autres en commençants par les plus
vieux. Et lui écrivait sur le sol (Jean 8, 1-11.)
Jeter des pierres non plus du faible vers le fort
pour se libérer comme David à l’égard de Goliath, mais jeter des pierres par
les forts vers le faible : jeter des pierres comme les gardiens du temple
de la foi et de l’orthodoxie en jettent toujours et partout, vers celui et ceux qui osent dire et faire une
réalité, une parole et un geste nouveau. Ce sera par exemple, le meurtre
d’Etienne le premier martyr ; ce sera l’approbation de ce meurtre par Paul
ce sera son écharde à tout jamais au cœur de sa vie et de son corps. On connait
encore cela dans le monde aujourd’hui.
Toujours une histoire de pierre. Qui nous ôtera la
pierre, non seulement celle du tombeau qui nous empêche d’approcher du corps
mais aussi la pierre qui pèse sur notre vie. Notre pierre, ce poids qui est là
en nous et qui nous plombe disons-nous parfois. Le Seigneur, le Père, Dieu lui-même,
vient ôter la pierre, trop lourde ; comme si quelqu’un était là toujours
là pour nous aider à remonter la pierre, pour la porter avec nous, pour la
supporter, pour la remplacer par une autre peut être moins lourde..
L’image est étonnante : devenir pierre
vivante ! Il est plus usuel que les hommes soient transformés en pierre en
statue pour qu’on ne les oublie pas. Ils sont morts et pétrifier propice
parfois à l’adoration des autres.
Pierre et c’est un comble que ce soit uniquement
Pierre l’apôtre ou son Eglise qui nous parle lui de tout le contraire :
"Approchez-vous de lui la pierre principale rejetée par les hommes mais choisie
par Dieu, elle est précieuse".
Devenez comme des pierres vivantes ! Ne devenez
pas un poids lourds et morts pour les autres
mais soyez bien vivants !
Pierres vivantes : Non pour la gloire de l’édifice, non pour la gloire
des autres pierres, mais pour la seule gloire de la vraie pierre celle qui nous
fait tenir tous ensemble pour que d’autres se sentent à leur tour pierres
vivantes ; c’est dire témoins qui durent et s’usent mais attestent que la
construction est en nous au service des autres pour les aider à porter et
supporter ; grâce à Celui qui sans cesse est là pour transformer nos cœurs
de pierres en cœurs de chair.
L’Eglise de Jésus Christ a besoin de tous et de
chacun c’est une communauté où personne ne peut dire : on n’a pas besoin
de moi ; car nous sommes tous et chacun des pierres vivantes belles et
plaisantes aux yeux de Dieu, qui crient et annoncent l’espérance et l’amour
possible en ce monde.
Ici comme
ailleurs, notre mission est claire : ne pas devenir des pierres inertes
celles vouées au souvenir mais devenir sans cesse des pierres vivantes qui
existent et ont du sens parce qu’elles sont en relations avec d’autres pour
construire par la foi un peuple joyeux et témoin d’une grande et bonne
nouvelle : la présence du seul Seigneur Jésus le Christ qui donne sens à
nos vies. Que cela soit notre espérance et notre joie.
Pasteur
Bernard Antérion
Président
de la Communauté des Eglises protestantes francophones dans le monde (Ceeefe) Le 19 avril.
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