La revue biblique Lire et Dire vient de publier dans son dernier numéro un article que j'ai écrit il y a peu. 3 autres pasteurs du Sud Ouest ont travaillé pour cette publication, des textes comme celui de l'Ascension, de la sorcière d' En Dor en 1 Samuel 28 ou encore un texte de Paul en Philippiens 3.
Le site de la revue Lire et Dire : www.lire-et-dire.ch : cela vaut la peine d'aller voir et même de s'abonner.
Je vous propose ici de larges extraits de l'analyse de Josué ch. 6. Vos remarques ou commentaires seront bien sûr, les bienvenus. C'est un peu technique au début mais ensuite, on arrive à des remarques et des commentaires plus stimulants !
Le texte dans son contexte :
Dans la rédaction du livre de Josué, une période s’achève. Josué succède à Moïse. Après la période du désert vient celle du don de la conquête. La manne s’arrête et les fruits du pays sont enfin consommés. Le temps est venu de se souvenir des temps anciens : la circoncision (ch.5) ainsi que la Pâque (5,10) sont pratiquées par les nouvelles générations. A Guilgal, des pierres sont dressées comme un sanctuaire commun aux tribus (ch. 4). Le franchissement du Jourdain rappelle la traversée de la mer des Roseaux (ch. 3 et 4,23) et la ruse de Rahab permet de franchir une muraille.
Avec le ch. 6, nous sommes au centre du dispositif de l’avancée dans le nouveau pays que l’on semble bien connaître. Le temps va structurer la progression dans l’espace. La préparation de la conquête s’exprime par la mention des « trois jours » (1,11 ; 2,22 ; 3,2). Le début de réalisation de celle-ci s’effectue, dans notre chapitre, selon les 7 jours de la création nouvelle. Le septième jour se distingue des six premiers (6,4). Le temps est associé à l’espace pour exprimer l’accomplissement divin.
Depuis le début du livre de Josué, les prêtres sont présents et actifs autour de l’arche et le livre de la Loi est la feuille de route de Josué (1,8). Il s’agit, dans un nouveau temps, de célébrer une semaine nouvelle, une création nouvelle, comprise comme une promesse. A quelle époque sommes-nous vraiment ici en ce début du livre de Josué ? Les exégètes montrent que nous serions en présence d’une relecture d’un événement fondateur, juste avant la période exilique (voir Th. Romer p. 48-49).
Ce qui est étonnant ici c’est, d’une part, l’abondance du vocabulaire liturgique et, d’autre part, la présence d’une relecture d’un récit de conquête à partir d’éléments liturgiques qui scandent un temps particulier, un temps sacré. Nous avons un récit de conquête dans la mesure où ce sont les premiers pas dans le pays de la promesse. Mais ces premiers pas sont liturgiques comme une procession, un défilé, une marche, avant d’être un combat guerrier.
Commentaire :
Le récit de la conquête du pays est un grand récit fondateur. Il est légendaire au sens de « legenda » : ce qu’il faut lire et raconter. Le récit est nécessaire à la cohésion, au rassemblement d’une communauté dans différents moments de son histoire. Lire un récit de conquête, c’est faire allusion à un passé inatteignable qui donne des raisons d’espérer dans un présent souvent problématique ou incertain.
Le récit s’ouvre sur le siège de Jéricho et la parole divine adressée à Josué, annonçant la victoire à venir. C’est Dieu qui livre et délivre. Pour la communauté d’Israël, il faut aussi affirmer que c’est presque toujours le Seigneur qui donne les victoires. La force des armes est atténuée par la puissance supposée de Dieu, qui devance et qui offre la conquête : « je t’ai livré Jéricho et son roi et ses vaillants guerriers » (v. 2). Avons-nous ici une liturgie mise en récit ? Peut être sommes-nous en présence d’une liturgie populaire appliquée à la conquête et à l’entrée dans le pays ? Le récit se poursuit (v.16) avec la répétition de la formule initiale : « le Seigneur vous a livré la ville ». Le récit se déroule entre ces deux situations. Les versets 17-21 apparaissent comme une lecture additionnelle relative au rite de l’interdit et donne à l’ensemble une dimension violente et guerrière.
Verset 1 : Ce qui caractérise Jéricho c’est sa fermeture ou son enfermement : la ville est « fermée et enfermée ». La clôture est sa condition actuelle et cela sans doute sous la pression d’un siège : « à cause des fils d’Israël ». Le lecteur ne sait rien des habitants enfermés.
Jéricho est une ville connue des archéologues à l’époque du Bronze Ancien, avant la période supposée de la conquête. Ce qui est étonnant, c’est l’abandon du site vers la fin du XIIème siècle avant J.-C., époque supposée de l’entrée en Canaan. Sur le site ancien, pas de trace de muraille ou de rempart protecteur que l’archéologie pourrait dater du temps de la conquête supposée du pays de Canaan.
Versets 2-3 : La parole divine adressée à Josué (jusqu’au verset 5) dit ce qu’elle fait : la livraison de la ville et de ses défenseurs « ses vaillants guerriers ». L’annonce divine donne aussi une étrange méthode de siège : les « hommes de guerre » sont appelés à devenir des membres d’une rotation-procession préalable, et cela pendant les 6 autres jours à venir.
Verset 4-5 : Apparition des ustensiles liturgiques comme promesse de libération. Les 7 prêtres et le son du cor sont-ils là pour effrayer ? (cf. Jg 7, 8-20). La corne de bélier rappelle l’épisode de la ligature d’Isaac durant lequel un bélier, pris par les cornes dans un arbuste, va être sacrifié par Abraham en lieu et place de son fils Isaac (Gn 22). L’arche est aussi présente comme objet sacral dans la procession. Le bruit libérateur provient de la clameur populaire à la fois élément de frayeur et bruit intense, comme une louange liturgique victorieuse. La chute du « rempart de la ville » interviendra comme une conséquence de la séquence liturgique. La situation initiale, celle de la fermeture, laissera place à l’ouverture dans tous les sens, de tous les côtés. Chacun pourra entrer dans le lieu fermé depuis l’endroit où il se trouve, semble dire le récit en recourant à la formule : « Droit devant soi ». Jéricho sera dés-encerclée, ouverte.
Le temps est aussi un indicateur liturgique. Le récit se déroule sur une semaine, -temps éminemment sacral- comme dans Genèse 1. Les 7 prêtres, le 7ème jour et les 7 rotations ultimes disent aussi le rôle majeur du temps divin comme élément structurant le récit. La mention de l’arche qui est transportée dans une déambulation circulaire ressemble à ce qui se passe au sanctuaire de Guilgal (2 Sm 6,15) lorsqu’elle fut transportée à Jérusalem « parmi les ovations et au son du cor ».
Verset 6-7 : Le chef de guerre se transforme en organisateur de cérémonie religieuse. Josué reprend ici la parole divine. Il fait figure de grand prêtre et/ou de prophète. Il est le médiateur entre la divinité et la liturgie en train de se déployer par vagues successives. La réalité sacerdotale du texte renvoie à une tentative de « démilitariser » le Dieu guerrier, à la manière assyrienne et bientôt babylonienne. Ici aussi, les écrivains bibliques relisent au présent l’histoire passée et supposée glorieuse de leurs ancêtres.
Verset 8-9 : Nous avons ici l’effectuation de la parole de Josué et la mise en place en bon ordre de la parole divine. La répétition de divers éléments (les 7 prêtres, les 7 cors, l’arche de l’alliance comme présence divine) ralentissent, dans le récit, le résultat final mais donne de la solennité et de la précision à l’opération.
Verset 10 : Josué adresse au peuple l’ordre de ne pas « pousser la clameur tout de suite ». Il ordonne le silence afin que le bruit, émis par le peuple, produise alors tout son effet : celui d’une frayeur ou celui d’une énergie ou d’un effort qui s’exprime dans une onomatopée : une sorte de « han ». Ce cri peut aussi être compris comme la manifestation d’une louange victorieuse. Nous avons là l’annonce anticipée décrite au v.16. La précision du moment opportun semble importante. Dans la liturgie en train de se dérouler tous les gestes, toutes les démarches, tous les silences ou cris sont importants et leur place dans l’ensemble du projet est essentiel.
Verset 11- 12 : Les paroles divines et prophétiques ont été proclamées. Le mouvement se met en route : l’arche tourne, on fait le tour, on rentre, on passe la nuit et Josué est le seul à se lever « de bon matin », signe du grand jour, du moment favorable où il doit se passer un événement important. Le livre de Josué est coutumier de cette mention (voir 3,1 ; 7,16 ou 8,10). Elle se retrouve au v.15, concernant alors tout le peuple. C’est le jour où il ne s’agit plus d’agir, comme faire la guerre, par exemple, mais de reconnaître l’action salvatrice de Dieu qui donne ce qu’il a promis.
Verset 13 : Le déroulement ou la marche en avant donne une place importante à « l’arche du Seigneur » : Une fois nommée au verset précédent et deux fois dans ce verset. L’arche est centrale, elle est précédée ou/et suivie. Elle est un outil décisif comme pour dire que c’est le Seigneur et sa Présence qui sont à la manœuvre et au centre du dispositif. C’est par Lui et grâce à Lui que tout arrive et en particulier la victoire.
Verset 14 : C’est la narration de la déambulation ou procession ordonnée et journalière. La mention des « six jours » permet de retenir l’arrivée du « septième jour », celui du jour de la victoire.
Verset 15 : Non seulement voici enfin le jour décisif, le septième, celui de la réalisation de l’annonce du verset 2 (« Vois, je t’ai livré Jéricho ») mais voici surtout que ce jour-là il y a sept rotations autour de la ville. Ce dernier jour, ou premier jour de victoire, s’accomplit comme un sabbat, comme un temps sacral où l’on doit se tourner vers Dieu. Comme au verset 12 avec Josué, voici que les prêtres aussi se lèvent tôt dès qu’apparait l’aurore. La liturgie est achevée : la réalisation est divine, parfaite et totale : le chiffre 7 en est le signe.
Verset 16 : Le récit s’achève avec l’ultime parole de Josué, un ordre relatif à la clameur et aussi avec une parole d’attestation, d’effectuation : c’est fait ! Ce qui a été annoncé se réalise non dans un corps à corps guerrier, non comme lors d’un siège militaire, mais dans une exultation, dans un chant accompagné au son du cor !
Versets 17-21 : Ils interrompent le cours du récit. L’adjonction probable du rituel de l’interdit (voir aussi Josué 8,2 et 27 et aussi 11,14) change la perspective initiale du récit : la reconnaissance du don de la conquête. Elle atteste et renforce aussi la perspective religieuse et guerrière du texte avec son caractère sauvage et inacceptable pour nous aujourd’hui. Nous avons ici une relecture de la pratique de l’anathème connu du Deutéronome (13,16-19 et aussi 20,16-18). Israël emprunte largement aux civilisations conquérantes et dominantes et s’arroge le droit de pratiquer les us et coutumes courantes et ennemies. C’est seulement dans cette relecture que se trouve la mention explicite de la chute du rempart au v. 20 : « le rempart s’écroula sur place ». Comme s’il fallait voir des résultats tangibles à l’annonce divine : « Vois ! Je t’ai livré Jéricho ». L’auteur de cet ajout guerrier veut montrer la réalisation complète et précise de la victoire. Cependant la fin du récit sera bien décrite comme une libration victorieuse. Il faut noter ici la mention de Rahab (v.17) promise au salut avec sa famille comme si la radicalité de l’anathème n’était pas totale (v.22-25). Grâce à elle, l’histoire va se poursuivre. Rahab et son clan sont sauvés (v.22-25) de l’anathème. Grâce à elle, le ch. 6 constitue une version médiane, en tous cas différente, de l’événement : entre le franchissement pittoresque, et peu guerrier, du ch. 2 et le récit traditionnel de la guerre de conquête au ch. 24 par exemple.
Il se pourrait que le rédacteur final de ce texte propose de donner prise et vigueur à un renforcement du culte et de la souveraineté royale à Jérusalem. L’arche, qui a résidé dans la capitale, était à l’œuvre dans le passé. Elle faisait des miracles jadis. Elle peut donc agir encore aujourd’hui. Elle est source de légitimation provisoire d’un présent plus ouvert sur l’avenir. L’instrument religieux, comme l’arche ou le texte de la Thora, est ainsi reconnu comme instrument divin.
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Enjeux théologiques :
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Enjeux théologiques :
a) La conquête comme annexe !
La relation entre religions et violence guerrière est un thème assez commun, toujours à évaluer. Paradoxalement, des textes de conquête comme Josué 6 peuvent nous aider à montrer que la guerre sainte n’est pas un message central des traditions bibliques. La place de ce récit est un élément d’appréciation : en effet il se trouve hors de la Thora, au début des « Nebiims » (prophètes). Ce texte est donc, pour la piété d’Israël, d’une moindre intensité. Il est un commentaire, une illustration de ce qui est en germe et en promesse dans le cœur de la révélation : la Thora mosaïque. Ainsi la place de ce récit peut être comprise comme l’affirmation secondaire de la possession de la terre, après le primat de la Loi. La conquête guerrière décrite comme bien réelle est aussi mise à sa place qui n’est pas la première. La conquête n’est pas la voie royale, elle n’est pas au cœur de la Loi d’Israël.
b) Le liturgique en prise avec la réalité.
La liturgie comme service du peuple est un vecteur pour exprimer un salut et une libération voire une pacification. La libération sera certes coûteuse avec la mention de l’anathème ! Mais le religieux est parfois aussi un instrument de pacification et d’atténuation de la violence. Ici la liturgie remplace le siège militaire. Nous sommes bien en présence du Dieu de la promesse qui donne ce qu’il promet et annonce. Le liturgique n’est pas un oubli ou un dépassement de la réalité : il en est une structure possible.
c) Quels murs Dieu veut-il faire tomber ?
Dans notre récit ce qui est fermé sur soi-même est appelé à s’ouvrir. Des murs doivent tomber : ce qui est pierre, muraille doit se transformer en réalité vivante. Les traditions vétérotestamentaires oscillent souvent entre deux pôles : ouverture universelle ou repli identitaire (voir Ruth versus Néhémie). Il y a toujours, comme le rappelle Qohelet, des temps pour « jeter des pierres » et des temps pour « amasser des pierres » (Qo 3). Le cœur du message de la foi d’Israël sera de rendre présent et vivant son Dieu. C’est ainsi qu’il faut comprendre les exhortations d’Ezéchiel, par exemple : « Je transformerai vos cœurs de pierres en cœurs de chair » (11,19). Mais à certains moments de son histoire, comme tu temps de Néhémie, avec l’édification et la restauration des murs de la ville (cf ch. 1, 2, 4, 6, 12 et 13), Israël sera tenté par des pratiques religieuses fermées et contraignantes.
Entendre ce texte aujourd’hui :
a) Aujourd’hui des murailles sont élevées.
Tout près de Jéricho passe aujourd’hui encore un mur de séparation ! La conquête et la reconquête des uns envers les autres et réciproquement n’est pas périmée. D’autres murs encore ont été construits pour contenir ou protéger. Les détruire n’est ni simple ni évident. Pourtant il n’est pas possible de se satisfaire d’une société qui érige des murs en permanence. Il existe aussi des murs et des remparts qui ne se voient pas : ils sont dans nos esprits et dans nos cœurs. Ils sont dans nos idéologies, nos programmes politiques, nos compréhensions du monde, au centre parfois de la vie de nos cités. Il faut entendre ici les critiques que notre société adresse souvent aux religions comme facteurs de haine et de séparations. La question d’une violence sacrée doit être démontée et contestée en montrant que même les textes les plus terribles ne sont pas au centre et suscitent aussi des interprétations plus pacifiques !
b) La liturgie comme maîtrise de la violence.
Les textes des traditions judéo-chrétiennes, loin d’éviter cette violence humaine bien réelle, invitent à la maitriser, à l’interpréter et à s’y opposer aussi. Par les mentions liturgiques (les gestes, les espaces et les temps) qui viennent atténuer l’effet de la conquête, mais aussi en guidant ainsi nos esprits vers d’autres récits, d’autres histoires (le sacrifice d’Isaac ou le bon samaritain par exemple), une bonne nouvelle est présente en Josué 6,1-16 : la présence de Dieu se manifeste par des gestes, des paroles, des objets et transforme des hommes armés en peuple de prêtres. Cette bonne nouvelle est aussi présente dans l’écoute de la réalité de Jéricho comme la fondation ou le lieu des palmiers : Jéricho dans la Thora est présentée comme oasis ! La route vers Jéricho est pleine de découvertes comme l’expriment les récits du NT.
Il faut noter par exemple que l’épisode de l’aveugle Bartimée est situé à Jéricho (Mc 11,46-52 ; Mt 20,29-34 et Lc 18,35-43). En rencontrant Jésus, les murailles -les écailles collées aux yeux de l’aveugle- tombent ! Les récits de Matthieu et de Luc attestent que l’on rentre et sort de Jéricho librement. Luc, par exemple, témoigne d’une rencontre entre un homme « descendant de Jérusalem à Jéricho » et un Samaritain (Lc 10,30ss.) Par ailleurs, c’est à Jéricho que Jésus demande à Zachée, perché sur le sycomore, de descendre (Lc 19,1-10). Enfin, l’Épitre aux Hébreux (11,30) insiste sur le rôle de la foi, et non de la guerre, dans la chute des murs de Jéricho : « par la foi, les remparts de Jéricho tombèrent » (Hb 11,30).
La liturgie ou la route vers Jéricho est comprise comme moyen de pacification à l’intérieur de nous-mêmes. La liturgie du culte dominical ou celle de cultes spécifiques peuvent être par le geste, la musique, le déplacement, des temps d’apaisement spirituel et personnel. Le rituel n’a pas toujours bonne presse. Et pourtant, il se pourrait qu’il décale, modifie et soit une aide pour dépasser et nommer nos propres désirs de violence. Il s’agit là de redécouvrir la dimension structurante de la répétition par exemple (entendre les mêmes textes, faire les mêmes gestes ou entendre les mêmes sons ou chants) sans réduire la liturgie à un enfermement ritualiste sans intérêt.
c) La guerre n’est pas toujours gagnante.
Il est sans doute utile de mettre en valeur aujourd’hui dans nos sociétés les efforts accomplis par des religieux parmi d’autres, qui conduisent aux processus de démilitarisation qui sont à l’œuvre dans le monde. Des hommes et des femmes se libèrent des carcans oppressants des systèmes politiques totalitaires. Des femmes et des hommes enfermés et contraints sont des repères et des signes de libération : des prix Nobel, des prisonniers politiques, par exemple. La voix des sans-voix et des sans-armes se fait aussi entendre dans le monde. Ce n’est pas toujours la puissance des armes qui triomphe mais aussi la volonté des peuples et les cris des plus simples et des plus fragiles.
Pistes pour la prédication :
a) Que faire de la violence ? Il faut l’interpréter, aider à la canaliser, à la mettre à distance avant de la combattre pacifiquement. Comment la contenir, l’appréhender, l’éradiquer ou la canaliser ? Des lieux de violence ou d’enfermement, à l’image de Jéricho, peuvent devenir des lieux de rencontres qui aident et qui sauvent. Il nous faut passer sans cesse des murailles aux palmiers ! De l’enfermement à la culture. De la clôture à la rencontre. D’une demande de protection à une vie civilisée et utile, avec la réalité de la palmeraie, par exemple. Nous ferons ainsi tomber nos murs, nos écailles, ouvrirons nos yeux à la suite de Bartimée et descendrons de nos lieux élevés pour rejoindre les autres, à la suite de Zachée !
b) Les religions et la violence : Vers une pacification. La religion ne n’est pas l’appel à la guerre mais à la paix ! Dans la foi, nous sommes appelés à devenir des « pierres vivantes », comme le dit Pierre ! Au service d’une vie ouverte et en relation avec les autres. Pour nous, le premier jour de la semaine, la « pierre a été roulée » : c’est l’œuvre du Seigneur en vue d’une nouvelle création, d’un temps nouveau et d’une nouvelle espérance. En Christ, Dieu est venu abolir les murs de séparation qui sont en nous et autour de nous. Ce qui est fermé en nous est appelé à s’ouvrir pour la louange, la victoire et le renouveau. De cette dimension personnelle on peut développer un aspect plus communautaire où l’action de l’Eglise dans la cité, est au cœur d’un dialogue interreligieux par exemple ou simplement d’une pacification entre confessions : célébrations lors de la Semaine de prière pour l’Unité des chrétiens.
c) La liturgie est une annonce de victoire et de rencontre possible. Elle fait signe et elle fait sans doute tomber des murs. Pour illustrer cette conviction, deux exemples peuvent prendre place dans un développement sur la force pacifique de la liturgie. En Sicile, à Palerme, le temple de l’Église Vaudoise d’Italie est au cœur de la cité, sur une grande place très fréquentée. Dans le temps liturgique du culte dominical, lorsque la confession de foi est dite par tous, on ouvre les portes du temple : on fait tomber les murs ! La confession de foi exprime le combat nécessaire contre les forces de mort et toutes les mafias ! Au nom du Dieu de la vie, celui d’Abraham, d’Isaac, de Jacob et de Jésus Christ, l’Église proclame son engagement auprès de celles et ceux qui veulent et vivent la vie plutôt que la mort ! C’est un moment liturgique fort durant lequel la communauté prend des risques, annonce une bonne nouvelle et témoigne du lien puissant existant entre ce que l’on croit et ce que l’on vit.
A la Force en Dordogne, lors du culte dominical au cœur de la Fondation John Bost au service des handicapés mentaux, lorsque l’assemblée dit le Notre Père, quelqu’un va sonner la cloche du temple. Tous les résidents et le personnel dans les divers pavillons qui ne sont pas dans le temple, entendent ce signal et peuvent s’associer à d’autres et participer ainsi ensemble, à un moment précis, à la prière commune. La liturgie fait lien entre inclus et exclus, ceux du dedans cet ceux du dehors. Les murs du temple n’ont plus pour fonction d’abriter ou de protéger seulement, ils ont été ouverts pour permettre la rencontre, la confession de foi et la prière ouverte au plus grand nombre.
Références bibliographiques :
Philippe Abadie , Le Livre de Josué. Critique historique (Cahiers Evangile 134), Paris, Cerf, 2005.
Marc Alain Ouaknin, Zeugma. Mémoire biblique et déluges contemporains, Paris, Seuil 2008. Thomas Römer, Dieu obscur. Cruauté, sexe et violence dans l’Ancien Testament (Essais bibliques 7), Genève, Labor et Fides, 2009.
Thomas Römer, La première histoire d’Israël (Le Monde de la Bible 56), Genève, Labor et Fides, 2007.
Thomas Römer, Jean-Daniel Macchi et Christophe Nihan (Eds.), Introduction à l’Ancien Testament (Le Monde de la Bible 49), Genève, Labor et Fides, 2009, pp. 332-344.
Albert de Pury, « La guerre sainte israélite : réalité historique ou fiction littéraire », ETR, 56/1981, p. 5-38.
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