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jeudi 3 octobre 2013
dimanche 29 septembre 2013
Riche / Pauvre : le choc du regard !
Evangile selon Luc ch 16
19 « Il y avait un homme
riche qui s’habillait de pourpre et de linge fin et qui faisait chaque jour de
brillants festins.
20 Un pauvre du nom de Lazare gisait couvert
d’ulcères au porche de sa demeure.
21 Il aurait bien voulu se rassasier de ce qui
tombait de la table du riche ; mais c’étaient plutôt les chiens qui
venaient lécher ses ulcères.
22 « Or le pauvre mourut et fut emporté par
les anges au côté d’Abraham ; le riche mourut aussi et fut enterré.
23 Au séjour des morts, comme il était à la
torture, il leva les yeux et vit de loin Abraham avec Lazare à ses côtés.
24 Alors il s’écria : Abraham, mon père, aie
pitié de moi et envoie Lazare tremper le bout de son doigt dans l’eau pour me
rafraîchir la langue, car je souffre le supplice dans ces flammes.
25 Abraham lui dit : Mon enfant,
souviens–toi que tu as reçu ton bonheur durant ta vie, comme Lazare le
malheur ; et maintenant il trouve ici la consolation, et toi la
souffrance.
26 De plus, entre vous et nous, il a été disposé
un grand abîme pour que ceux qui voudraient passer d’ici vers vous ne le
puissent pas et que, de là non plus, on ne traverse pas vers nous.
27 »Le riche dit : Je te prie alors,
père, d’envoyer Lazare dans la maison de mon père,
28 car j’ai cinq frères. Qu’il les avertisse pour
qu’ils ne viennent pas, eux aussi, dans ce lieu de torture.
29 Abraham lui dit : Ils ont Moïse et les
prophètes, qu’ils les écoutent.
30 L’autre reprit : Non, Abraham, mon père,
mais si quelqu’un vient à eux de chez les morts, ils se convertiront.
31 Abraham lui dit : S’ils n’écoutent pas
Moïse, ni les prophètes, même si quelqu’un ressuscite des morts, ils ne seront
pas convaincus.
Un
homme riche et le pauvre Lazare c’est un peu comme « vu la télévision » : La
pratique du portrait croisé ! On voit la description d’un personnage et
aussitôt celle d’un autre qui vient compléter ou se mélanger ou faire
contraste. L’objectif est de faire dépendre la description de l’un avec celle
de l’autre et montrer que les deux réalités, les deux visages les deux vies
sont inséparables ou bien se comprennent l’une part l’autre, l’une grâce à
l’autre. Ce sont des portraits en miroir !
« Il
y avait une homme » comme il était une fois…Nous ne sommes pas dans la
description historique mais dans la parabole ou mieux dans un récit
exemplaire ! Pour l’exemple : pour faire comprendre aux lecteurs que
nous sommes, qu’il y a sûrement pour nous quelque chose à faire à comprendre à
croire ! L’auteur veut sans doute que nous nous identifiions aux sujets,
aux acteurs de cette histoire et que
nous entrions dans le scénario qui nous est décrit.
Le
récit est extrêmement commun et
banal ; on en trouve des exemplaires en Egypte comme en Grèce ou dans la
littérature juive. La « manière conventionnelle de décrire un pauvre ou un
riche coexistait alors avec une description moralisante de la destinée des bons
et des méchants. Le renversement des sorts faisait partie du jeu pour la
réflexion » d’après Bovon.
Le rapprochement entre cet
homme riche et Lazare
n’est pas ici la description d’une fatalité. Au fond des pauvres il en aura toujours ;
seul l’au-delà permet d’espérer. Il faut
bien faire avec cette réalité. Et comme pour l’adoucir ou mieux la faire
supporter on affirme qu’un jour cela ira
mieux : les réalités s’inverseront, les riches seront pauvres et les
pauvres seront riches. Il faut bien avouer que cela en Occident à été vécu et
exprimé comme cela dans une sorte de doctrine implicite critiqué radicalement
au point de faire de la religion ainsi comprise comme l’opium du peuple.
Le rapprochement croisé du
riche et du pauvre n’est
pas là non plus pour nous dire qu’au fond seule la mort égalise et met sur le
même plan tous les humains. Ce serait une compréhension fataliste celle d’un
fatum d’un destin que rien ni personne ne peut changer ; « il faut
faire avec c’est la vie c’est comme ça
et cela a toujours était ainsi ! » La résignation serait alors la
seule possibilité de continuer à vivre sans espérance. Le texte insiste en
effet en disant « le pauvre mourut…le riche aussi mourut et fut
enterré. » v.22.
On a pensé aussi que ce rapprochement était une tentative de répondre à une
situation bien connu des églises chrétiennes du premier siècle : Comment
se fait-il que Jésus mort et ressuscité n’attire pas plus les foules ? Et
surtout pourquoi le peuple d’Israël
a-t-il à quelques exceptions il est vrai, refusé d’y croire ?
« Même si quelqu’un ressuscite des morts, ils ne seront pas
convaincus ! » L’incrédulité n’est pas vaincu par la résurrection
mais par autre chose, de plus concret de plus tangible !
Alors
de quoi s’agit-il ? Quel est l’intérêt de ce récit pour ses lecteurs et en
particulier ceux de l’évangile de Luc seul à le raconter ainsi ?
Ce
qui a depuis toujours frappé les lecteurs et les auditeurs se sont les
descriptions des personnages comme celles de leurs situations. Ce qui
caractérise le riche de cette histoire ce sont son habillement et les brillants
festins qu’ils donnent ; on n’est pas loin de la description critique des
prophètes et en particulier Amos.
C’est
aussi l’éclat de sa demeure car il possède dit finement le texte « un porche »
où se tient Lazare décrit avec non des habits mais plutôt sa peau ulcérée. Ce
n’est pas le méchant opposé au gentil. Ce n’est pas le coupable opposé à sa victime.
L’un n’est pas puni par la mort qui survient. L’autre n’est pas en quête et
désireux de la mort qui survient ici aussi normalement. Nous ne savons rien des
pensées et des actions de ces personnages. Ils sont tous les deux décrits, non
de l’intérieur dans une pure extériorité. L’une brillante l’autre souffrante et
douloureuse ; l’une nourrie l’autre famélique. Ils sont décrits et présentés
du point de vue extérieur : du côté de ce qui se voit. Mais ce qui fait
problème semble dire l’auteur du texte c’est curieusement qu’ils ne se voient
pas ! L’auteur du texte ou Dieu les voit, il nous les montre en train de
ne pas se voir dans un premier temps.
L’homme
riche, c'est-à-dire nous-mêmes, nos Eglises, nos sociétés : ne voient plus
rien sinon ce que l’on veut bien nous montrer. Le risque majeur serait de faire
comme si on ne voyait plus ni la réalité du monde ni les autres à nos portes,
sous nos porches, dans nos rues, dans les zones légales lorsqu’elles existent.
Le riche de la parabole voit le pauvre avec Abraham lorsqu’il est trop tard.
Il pouvait dire jadis qu’il ne voyait
pas car il ne savait pas. Vient un moment celui de la lucidité essentielle.
Vient ce moment tardif, on l’on voit pour soi même mais aussi pour les
autres ; le voici en train de penser en train d’intercéder non plus pour
lui-même mais pour ses frères. Le riche tardivement devient solidaire car
maintenant il voit clair et juste.
La leçon du texte : une piste possible en tous les cas
serait celle de l’urgence d’agir maintenant avant qu’il soit trop tard. Encore
faut-il voir pour agir. L’évangile de Jésus Christ c’est de se souvenir de la
foi pour rien qui caractérisait Abraham véritable porte parole de l’humanité
c’est de se souvenir de l’exhortation des prophètes qui parfois dans la
véhémence ont associé le retour aux valeurs divines avec le retour aux valeurs
de droit et de la justice. C’est aussi se souvenir de Moïse porteur et
annonciateur d’une loi qui tient compte de chacun et de tous ; de ceux de
la tribu et des autres qui sont aussi créatures et image du Dieu de la
révélation et du don des paroles comme des commandements qui font vivre et non
mourir.
Il
se pourrait que la reconnaissance de nos Eglises et du message de l’évangile
soit compris aujourd’hui dans le monde comme liés à la réalité du monde
occidental riche et qui ne veut pas voir la réalité du monde que nous connaissons bien. Le christianisme est
associé aujourd’hui au premier monde, celui de l’avoir et du pouvoir. Pourtant des
efforts ont été faits et réalisés ; on est passé au dessous du milliard
d’humains mal nourris ; Nos pays, nos Eglises, les associations en tout
genre sont de plus en plus généreuses et ont une fonction réparatrice reconnue.
Pourtant cela n’est pas suffisant nous sommes perçus comme ceux qui ont, devant
ceux et celles qui n’ont pas.
Des chrétiens de toutes les églises encore se retrouvent dans ce que l’on appelle
le Défi Michée du nom du prophète biblique. Ce projet est simplement de prendre
au mot de mettre en valeur la parole la promesse des principaux gouvernants du
monde de réduire la misère dans ce monde de moitié en 2015 ! Est-ce encore
raisonnable ?
«
Ils nous ont seulement recommandé de nous souvenir des pauvres, ce que j'ai eu
bien soin de faire. » dira Paul après sa visite à Jérusalem (Galates 2:10). Voici que ce qui nous semble une banalité voire une
évidence devient le moteur de l’annonce de l’Evangile de Jésus Christ.
En tant que chrétiens, nous voulons déclarer que Dieu se préoccupe des
plus démunis et nous, voulons rappeler à nos leaders que les actions de
réduction de la pauvreté valent bien tous nos efforts. Nous devons nous
souvenir des pauvres.
Il
s’agit bien d’espérance et de miracle ; il y va non seulement de la
crédibilité de nos Eglises mais aussi du contenu de notre foi qui pourrait être
balayé et durablement inacceptable pour la plupart des humains.
Jésus
raconte une parabole, Luc met en forme un récit exemplaire pour que des
auditeurs se sentent concernés par son contenu. Il ne s’agit pas de conceptions
post mortem ; mais il s’agit de vie et de mort autour de nous. Ne
pas essayer encore une fois de traiter cette réalité c’est sans doute de pas
voir ou ne pas vouloir voir même avec de bonnes raisons.
L’évangile
n’est pas là pour nous rendre coupables et honteux, mais pour nous rendre vigiles,
éveillés, attentifs au centre au cœur de notre foi. Voir, ce qui est vu, voir
au loin est souvent associé à la foi qui n’est pas seulement un regard intérieur,
introspectif mais aussi une nouvelle manière de voir de ce qui nous entoure.
Voir la création c’est parfois penser au Créateur. Voir les créatures et les
visages humains c’est aussi voir comme dans un miroir le Créateur qui nous
accompagne et nous donne la force et l’énergie de l’espérance pour un avenir de
promesses de vie, pour chacune et
chacun.
vendredi 13 septembre 2013
Le perdu et le retrouvé !
Lecture : Luc 15 :
les 3 paraboles : le perdu et le retrouvé.
Comment revient-on à la vie ? ou de la
vie ? Non il ne s’agit pas de penser ou de croire l’au-delà ; il n’est pas question de faire de
la métaphysique c’est à dire, ce qui
serait après les réalités concrètes ; il s’agit bien de rester là dans
l’en-de çà, c’est à dire parmi nous dans notre monde. On revient en vie et à la
vie lorsque la relation est établie et rétablie. La vie revient comme relation
essentielle lorsqu’on peut se mettre à table, manger et boire. Autrement dit et
avec une autre image : lorsque le courant passe à nouveau entre des
personnes. Lorsque la lumière illumine les uns et les autres qui ont le désir
de s’approcher à nouveau. L’Evangile ou
la foi chrétienne est là, dans ce mouvement ce désir et cette vie.
Au fond le christianisme est assez simple à énoncer
et à comprendre et particulièrement difficile à vivre et à réaliser. On
pourrait même dire que nous ne l’avons pas encore vraiment essayé ; on ne
s’est pas encore mis réellement à le vivre à grande échelle ; Et il faut
bien dire que si pour Dieu, mille ans sont comme un jour, alors nous en sommes
seulement au début du deuxième jour.
Oui, il s’agit tout simplement de
mettre en route la réalité du christianisme c’est sans doute notre
responsabilité principale. Il est nécessaire de nous débarrasser de l’idée que
nous sommes une vielle chose en perte de vitesse et qui n’intéresse plus
personne. Il faut sans doute renoncer aux formules qui disent que tout cela -
nous l’avons déjà fait – et déjà essayer et rien n’est donc possible. Je suis
convaincu que nous n’avons pas tout, loin de là, pas tout essayer pas tout
réaliser pas tout vécu, pas tout proposer en nous-mêmes comme autour de nous.
Nous connaissons bien l’exemple célèbre, du fils
prodigue - le dépensier - qui fait retour sur lui-même et vers les siens. Ou du
Père prodigue : le dépensier qui n’hésite pas à tuer le veau gras au
retour de l’un des siens. Et dans ce même chapitre 15 de l’évangile selon Luc
et de façon originale et unique - car on ne retrouve pas ces textes ailleurs -
sont décrites des situations semblables où une réalité précieuse est perdue et
retrouvée au prix d’un certain effort au prix d’une recherche. Ce qui est perdu
est retrouvé.
Ces récits présentent une réelle
progression dans l’esprit du premier siècle de l’ère chrétienne ; d’abord
le monde animal, une brebis retrouvée après que le berger eût laissé les 99
autres. Puis le monde humain et féminin : une pièce d’argent perdue par
une femme qui cherche partout dans sa maison ; et puis le monde humain et
masculin, avec les fils et frères et le pater familias, le chef de la maison,
de sa maison. On pourrait d’ailleurs, raconter ces trois histoires en une
seule. Où la même aventure –perdre
/retrouver ou mourir/ou vivre – arrive à tous les étages de la maison, à tout
le monde : le personnel d’abord, les bergers sont concernés et la gestion des
affaires du troupeau c’est l’activité professionnelle ; mais aussi la femme de la maison est
concernée ; on pourrait dire la mère qui gèrent les dépenses de l’entretien de
la maison et afin le père qui a en charge comme à cette époque la gestion de la
descendance et de la transmission du patrimoine, bref qui s’occupe de l’avenir
des enfants. Toute la maisonnée, toute la famille est concernée.
Et l’on n’a pas trouvé mieux que cette réalité
familiale pour dire et caractérisée la vie ecclésiale ; la communauté ou
l’assemblée de l’Eglise locale comme en son sens plus large est représentée
comme une famille. Les membres s’appelleront frères et sœurs, ils auront un
seul Père ; cette communauté sera pour les traditions orthodoxes et
catholiques une sorte de Mère ; cette appellation sera rejetée, on le sait
par les Réformateurs du XVIième siècle. Oui l’Eglise ressemble à une
famille ; c’est sans doute aussi pour cela c’est agréable et utile et en
même temps assez compliqué. Dans l’Antiquité la famille c’est le socle social
par excellence, le lieu de vie indispensable, car sans cela on est comme les
veuves et les orphelins sans statuts sans protection ; les communautés
chrétiennes élargiront le cadre familial pour y faire entrer ceux qui n’y ont
plus droit : veuves, orphelins et esclaves aussi. Ceux qui n’avaient plus
de famille en trouveront une, comme cadre protecteur et vital.
Mais en même temps la famille est un cadre oppressif
et même dangereux ; lieux de tous
les pouvoirs et de toutes les perversions. Les tragédies comme les comédies de
la littérature ancienne et moderne en sont l’illustration. La famille est aussi
en évolution ; elle prend aujourd’hui des formes variées, étonnantes
parfois, positives et négatives aussi. Bref il n’y a pas de modèle unique, il
n’y a jamais eu de modèle simple ; il en est de même pour la vie de la
communauté chrétienne et la vie de l’Eglise qui est aussi aujourd’hui appelé à
ce transformer à se remettre en question
parfois, bref à exister autrement.
Il s’agit pourtant au cœur de ces évolutions de
discerner ce qui demeure principal, ce qui est important ou ce qui est le point
fixe qui permet de vivre avec tous les autres repères et qui permet de
dire : voilà nous sommes là en connaissance ; nous sommes bien là
chez nous ; nous sommes encore et à notre manière l’Eglise de Jésus
Christ, la famille chrétienne.
Retrouver la vie ; être dans l’état de celui ou
celle qui trouve ce qui était perdu ; aller faire ses expériences et sa
vie ailleurs et pourvoir dire ensuite c’est là chez moi ; je me sens
accueilli parmi ceux-là ; je fais partie de cette famille.
La vie chrétienne c’est chercher et trouver et
continuer de chercher et trouver. Chercher sans cesse est désespérant et
épuisant ; trouver sans cesse, c’est être dans l’illusion ou la magie.
Vivre l’absence et la présence, c’est participer à la famille de Dieu c’est
vivre en Christ.
La vie chrétienne c’est vivre dans
l’étonnement ; ne plus être étonné c’est prendre de vivre sous le mode de
l’éternel retour et de la banalité de ce qui est toujours le même.
Etre étonné par Dieu d’abord. Ou autrement dit
changer nos réflexes, nos idées, nos représentations et nos images toutes
prêtes que nous nous faisons de Lui ;
Le
pater familias est plutôt un tyran
qu’un père affectueux et tendre. Le Père c’est celui qui dit la Loi, qui juge,
qui punit et qui récompense. C’est davantage
un père fouettard qu’un père fêtard. Sauf dans la famille du Dieu de
Jésus Christ.
La
notion de Père est proche finalement de celle de Juge et de tribunal. C’est
bien souvent y compris dans l’évangile en particulier celui de Matthieu (ch.
25) l’image du roi qui préside le tribunal surtout à la fin ; le roi et
père est celui qui règle les compte. Pas dans la parabole de ce jour : il
ne règle pas les comptes il les ouvre. Il aurait pu se risquer à quelques
réprimandes justifiées sans doute. Il est affirmation de liberté de gratuité et
même plus de dons au-delà même du raisonnable. Avec le Père de la parabole ce
n’est pas ce qui est nécessaire qui compte c’est ce qui est en plus ; ce
qui déborde ; ce qu’il à son bien son avoir son travail ressemble à sa
joie, qui ressemble à la vie nouvelle qui est à nouveau là présente. Lorsque
Dieu nous étonne nous sommes dans sa famille.
La relation fraternelle reprend une nouvelle
dimension et se recompose dirions-nous aujourd’hui ; ce qui allait de soi
ne va plus de soi. Les valeurs naturelles ou plutôt habituelles sont changées
ou en train de changer. Là où la parole était impossible entre l’aîné et le
père entre les deux frères voici qu’elle se met à exister. Là où on était dans
le domaine de l’avoir et les familles c’est bien toujours d’abord du
patrimoine ; voici que celui ci devient humain, vivant relationnel. Voici
que l’investissement devient relationnel et cela est compliqué, peu évident et
en même temps complètement nécessaire.
La relation avec soi même est aussi changée et en
train de l’être. Ce n’est plus l’autre qui dit : tu as péché ; tu as
tord ; tu dois te repentir, changer de vie et revenir vers nous, ensuite.
Ce ne sont plus les autres ni leurs regards ni leurs paroles qui sont jugent ou
qui analysent, c’est ici soi-même. Dans la famille de Jésus chacun reçoit la
capacité de l’auto-analyse de soi, du retour sur soi, sur cette introspection qui
me fait dire : je sais bien ce que j’ai fait ce que je suis du moins à mes
yeux ; je suis et deviens sans cesse toujours plus lucide sur moi-même.
Dans la famille nouvelle celle de la vie et de la foi. Ces éléments là, sont à
moi et pour moi, ils ne sont en rien le moteur de l’action des autres, ils ne
font plus partie des autres et de leurs nouveaux regards. Personne dira : tu as
raison, tu t’es repenti tu peux venir. L’autre dira : viens et entre dans
ma joie de te voir là de te savoir là et mangeons ensemble !
La vie de l’Eglise et de la foi c’est mettre au
centre la joie d’une présence. C’est ne pas désespérer d’une absence. C’est se
mettre à changer nos images et nos habitudes de penser et de croire. C’est voir
l’autre, c’est l’entendre avec un autre regard une autre oreille, une autre
main en train de m’inviter. Dans la
parabole de la famille, celle des deux fils c’est aussi celle d’un père nouveau
comme Dieu, qui est là pour chacune et pour chacun.
Il nous propose une nouvelle façon de vivre la vie
et la foi ; même et surtout si nous avons des habitudes. Pas seulement parce qu’il nous accueille
comme nous sommes mais aussi parce qu’il nous donne la capacité d’être lucide
sur nous-mêmes et il nous donne ce nouveau regard, cette nouvelle écoute à
l’égard des frères des sœurs des pères et des mères en la foi.
lundi 26 août 2013
Noé, fidélité et intelligence
Or au bout de quarante jours, Noé ouvrit la
fenêtre de l’arche qu’il avait faite.
7 Il
lâcha le corbeau qui s’envola, allant et revenant, jusqu’à ce que les eaux
découvrent la terre ferme.
8 Puis il lâcha la colombe pour voir si les eaux
avaient baissé sur la surface du sol.
9 Mais la colombe ne trouva pas où poser la
patte ; elle revint à lui vers l’arche car les eaux couvraient toute la
surface de la terre. Il tendit la main et la prit pour la faire rentrer dans
l’arche.
10 Il attendit encore sept autres jours et lâcha
à nouveau la colombe hors de l’arche.
11 Sur le soir elle revint à lui, et voilà
qu’elle avait au bec un frais rameau d’olivier ! Noé sut ainsi que les
eaux avaient baissé sur la terre.
12 Il attendit encore sept autres jours et lâcha
la colombe qui ne revint plus vers lui.
Noé :
Une première et éternelle alliance : Voici l’eau qui fait mourir et qui
fait vivre, voici la terre lieu indispensable et vital, celle qui est
nourricière et que vient rencontrer l’eau qui dérange qui nettoie et qui sera
marque et signe éternels de la vie.
1- Noé, une vieille très ancienne tradition,
lue dans l’épopée de Gilgamesh avec Utanapichtim en quête d’immortalité ;
la question c’est alors comment durer, comment ne pas mourir alors que tout les
éléments sont contraires, hostiles, comment être comme des dieux, des divinités
toujours là et dont on ne raconte jamais la mort ; mais seulement le
remplacement de l’une par l’autre. L’être humain est-il remplaçable par un
autre ? Une quête encore
contemporaine, si l’on regarde des magazines et certaines émissions sur
l’allongement de la durée de vie, les pilules de jouvence, les marchands
d’éternité sont encore bien là ! Ce vieux texte ne dit pas que l’objectif
à atteindre serait une illusoire éternité ou immortalité ou une précaire
réincarnation mais l’assurance que l’avenir, est toujours promis. Quoiqu’il
arrive Noé aura une suite son âge mythique ne fait rien à l’affaire, ses
enfants, les autres plus vastes encore
(comme les femmes de ses enfants sorties de nulle part) seront son avenir muni d’une promesse
qui ne s’éteindra pas.
2- Cette histoire universelle de Déluge comme
menace sur la vie réelle des humains est comprise et interprétée comme un
regret de Dieu, comme une colère qui revient sur ce qui a été fait et qui
disait que tout fut trouvé bon ; car Dieu vit que cela été bon et même
très bon. Comme si Dieu était une personne au grand pouvoir celui de construire
et de casser ! un Dieu sujet à des émotions et à des crises ; un Dieu
caractériel et enfantin. Cette histoire vient nous dire comme dans un premier
moment, une première étape que ce Dieu là ne peut être figée enfermée dans un
dogme dans une idée dans une théologie, ni même dans un groupe humain ni même
dans la conscience de l’humain. Un Dieu étonnant qui est présent certes quand
tout va mal. Et ça nous connaissons, nos contemporains connaissent bien
lorsqu’ils donnent acte à Dieu de tout ce qui va mal dans le monde et sur la
terre. Comment croire en sa réalité et sa présence en voyant tout ce que l’on
voit ? Les guerres, la mort des innocents, les famines, les tremblements
de terre et les tsunamis de toutes sortes.
Désormais le regard est porté vers un ailleurs. Le mal ce n’est plus
du côté de Dieu, mais si mal il y a, les humains seront responsables. On
sait aujourd’hui que bien des catastrophes naturelles sont non le fruit du
hasard ni de la volonté de Dieu ou d’un dieu mais de la vie des hommes qui vont
sans doute trop loin dans leur gestion du monde et de l’univers, trop loin et
trop peu soucieux de la vie de la terre. Ce vieux texte est optimiste du côté
de Dieu et pessimiste du coté des humains plutôt enclins au mal dès le départ
non à cause d’un autre mais à cause de lui, dès le départ de sa vie porté au
mal, dès sa jeunesse !
3- En prolongeant cette idée au fond écologique
nous pourrions dire que nous vivons tous dans la même maison, la même oikos et
cette maison ressemble à une arche dit le texte. Deux textes de la Bible parle
de cette arche (téba : comme une thébaïde !) Celui-ci bien-sûr, et le
récit du sauvetage du petit Moïse dans son couffin flottant sur le fleuve,
protégé ainsi des eaux. Dieu est le maître de la maison flottante ; il est
l’artisan l’architecte l’auteur de ce qui protège et sauve. Il fait faire par
des humains ce qui les protège et les sauve. Il fait en sorte que la vie flotte
sur les eaux, que la vie et les vivants, émergent de ce qui pourrait les
engloutir. Oui la foi, l’espérance d’un seul avec d’autres sauve tous les
autres. Oui ce qui est à contre-temps ce qui n’est pas dans l’air du temps
construire un bateau sur la terre ferme et loin de la mer ou du fleuve peut
sembler un délire et une folie. Et pourtant c’est bien cela qui sauve. Lire la
Bible et croire ce qu’elle annonce et ce qu’elle veut, ne va pas de soi ;
être chrétiens aujourd’hui, être croyants reliés à d’autres par une institution
humaine ne semble pas indispensable notre travail notre engagement ressemble
d’un peu loin il est vrai à la construction d’une arche par laquelle Dieu seul
vient sauver la vie et les vivants ; la communauté de l’Eglise n’est pas
le royaume n’est pas le salut mais son annonce et son anticipation indispensable ;
oui c’est une proposition de salut : pas seulement les hommes et les
femmes mais les vivants tous les vivants celles et ceux capables de reproduire
la vie de se reproduire et de vivre l’éternité du temps dans la suite des
générations.
4- Le texte du Déluge annonce
la bonté de Dieu, sa fidélité à toute épreuve résumée en quelque sorte par un
« plus jamais çà ! » Désormais les humains seront responsables
des dérèglements de la terre, moi plus jamais je ne frapperai les
humains ! Dieu n’est plus le Dieu de la colère ou de la vengeance mais
déjà le Dieu de l’amour qui dure malgré tout. Mais en même temps le vieux
texte du Déluge et de Noé annonce l’intelligence de l’homme et la piété ou la
foi qui se met en marche.
A l’obéissance, la soumission de Noé aux
injonctions de Dieu et à ses ordres, voici qu’apparaît son intelligence. Comme
pour nous dire : n’attends pas que Dieu te parle : agis, invente,
fais valoir de ce que tu as reçu !
Noé
invente le baromètre ou mieux encore, la mesure ; à la démesure de Dieu ou
de la nature, voici l’invention de la mesure ; Noé discerne et détermine
l’instrument de mesure. Pour savoir si ça monte ou si ça baisse, il essaie, il
envoie, et il sait ; oui un savoir se met en route plus besoin d’attendre
les décisions divines on peut désormais piloter et se piloter dans la vie dans
l’existence. Oui l’humanité peut grâce à son savoir ses connaissances ses
expériences faire face à tout ce qui peut arriver.
Ce
texte est un encouragement à la faculté d’entreprendre et de se conduire dans
la vie lorsque nous est donné la responsabilité des autres humains. C’est un
texte d’espérance et de reconnaissance. L’espérance intelligente et créative
d’abord : « Noé tendit la main et voici qu’elle avait au bec un frais
rameau d’olivier et Noé sut ainsi que les eaux avaient baissé sur la
terre. » (8, 10-11) La piété, la
foi ensuite comme acte de reconnaissance tournée vers le créateur qui nous fait
co-créateur avec lui : « Noé éleva un
autel pour le Seigneur et il offrit des holocaustes sur l’autel » (8,
20)
5- L’association de
cette intelligence de Noé et de sa reconnaissance : c’est cela qui change
tout. Sa vie sûrement sa responsabilité est désormais sous le regard des autres
et de Dieu lui. Cela change Dieu aussi : il ne punira plus de façon générale
et absolue ; Dieu n’est plus celui qui fait pleuvoir sur les bons et
sécher et rôtir les moins bons ; il fera briller son soleil sur les justes
et les injustes dira aussi le NT. La création aussi est renouvelée,
recommencée, reprise et pour toujours ; d’autres étapes viendront la
compléter et lui donner un sens mais tout est là poser, pour que ça marche.
Comme
pour nous dire que l’intelligence seulement, les facultés humaines seules ne
sont pas suffisantes pour un monde une maison bien équipée. La piété seule, la
religion seule et dominante n’est pas souhaitable car elle maintien la créature de Dieu dans
une soumission infantile et peu créatrice. L’association de l’intelligence de
l’humain et sa faculté à dire merci à Dieu à lui être reconnaissant va
résolument tout changer : les humains - Dieu et le monde.
La terre, notre veille terre dépend aussi de nous, elle est promise à la bienveillance de Dieu. Il ne s’agit pas de tout garder en l’état mais d’entrer dans un processus de création et de re-création ou de création continuée qui passe par nous notre intelligence et notre foi mélangée pour toujours cela sera un signe que nous pouvons contrôler et même parfois faire reculer cette méchanceté qui gît au fond du cœur des hommes. Dieu est lucide pour nous et avec nous, Il nous invite – et c’est cela sa patience - à garder et sauvegarder sa création, il nous rend capable d’agir intelligemment d’espérer avec confiance et de croire avec amour.
dimanche 18 août 2013
jeudi 1 août 2013
Un conservateur habile en rhétorique
Article paru dans "Le Monde" daté vendredi 2 août 2013
Le pape François n'est pas un
révolutionnaire
Le
pape François a donné sa première conférence de presse dans l'avion qui le
menait de Rio de Janeiro à Rome dans la nuit de dimanche 28 à lundi 29
juillet. Depuis qu'il occupe le siège de Pierre, il propose une tout autre
image de sa fonction que Benoît XVI. Son style est nouveau - langage non
magistral, sens de la formule spontanée, simplification du protocole - et
surtout il manifeste une plus grande proximité avec " le peuple, à commencer
par les plus pauvres et les plus faibles ", sans
oublier les jeunes à Rio, qui ont apprécié le changement de ton.
Tout
le monde reconnaît que le successeur de Pierre est en train d'opérer un
changement important dans l'Eglise catholique. D'ailleurs, l'affection
populaire le prénomme déjà le " bon pape François "
en référence à Jean XXIII qui fit souffler un vent de réforme avec Vatican II
(1962-1965).
Notre
point de vue prend le contre-pied de cette façon de penser. Aucun changement
d'importance sur le plan structurel n'est à attendre. Le style nouveau et la
mise en scène renvoient à une méthode d'argumentation théologique très
ancienne, développée notamment par les jésuites : la casuistique.
Conçue
comme une forme d'argumentation, la casuistique est un art rhétorique qui
confronte le cas particulier et la jurisprudence, d'une part, à un ensemble
de principes généraux, d'autre part. Les jésuites s'en emparent au XVIe
siècle pour lutter contre la réforme protestante. L'ambition est de convertir
en masse à " la vraie religion " en adaptant, autant que faire se
peut, les principes originels... sans - trop - en trahir l'esprit.
Quatre
piliers ou " 4 p " constituent la casuistique jésuite :
proximité, pragmatisme, principe et... performance. Le pape François, premier
jésuite à occuper la fonction papale, sait les mettre à l'oeuvre dans notre
société par le truchement des médias.
La
proximité, tout d'abord. La casuistique enseigne qu'il faut être empathique
et solidaire des cas particuliers, de ce qui semble petit, marginalisé pour
remonter vers le plus général, vers le plus central par touches successives.
François ne fait pas autre chose en simplifiant le protocole pontifical, en
habitant dans une modeste demeure, en se rendant accessible au peuple.
Solidarité
encore avec ce qui est abandonné, lorsqu'il jette une couronne de fleurs dans
les eaux de Lampedusa pour commémorer les centaines de migrants naufragés.
Solidarité avec les plus humbles et " coup de com " lorsqu'il ne va
pas au concert de musique classique donné au Vatican en l'honneur de l'année
de la foi, le 23 juin, en déclarant : " Je ne suis pas un prince de la
Renaissance, qui écoute de la musique classique plutôt que de travailler.
" Il demande non seulement aux jeunes mais aussi
aux... journalistes de l'aider à aller dans le sens de " l'empathie "
et de "
collaborer pour le bien de la société ".
Autre
pilier, le pragmatisme. S'orienter vers l'action concrète, agir au coeur du
monde en mettant au premier plan la pratique plutôt que la théorie, le pape
François ne fait pas autre chose quand il revendique sa simplicité et son
souci permanent d'aller sur le terrain quitte à créer des bousculades, comme
aux Journées mondiales de la jeunesse. Pragmatisme encore, quand on sait
qu'avec plus de 7 millions d'abonnés sur Twitter, le " pape courage
", " homme de l'année " - selon l'édition italienne du Vanity Fair
- supplante le dalaï-lama, chef spirituel jusque-là le plus populaire sur ce
réseau social. Pragmatisme enfin quand il s'attaque à la réforme de la banque
du Vatican, instaurant une " enquête de terrain "
et déclarant non sans un certain sens de la formule : " Ne vous laissez
pas tenter par l'argent. Saint Pierre n'avait pas de compte en banque. "
Troisième
pilier, le rappel des principes originels. Mariage gay et avortement ? Lors
de sa conférence de presse, le pape répond sèchement : " Vous connaissez la
position de l'Eglise. " Place des femmes ? " L'Eglise est
féminine ", soulignant la primauté de Marie
sur l'institution. Le pape ne déroge à ce que les Pères de l'Eglise ont déjà
écrit. Ordination des femmes ? Il répond : " Jean Paul II a fermé la porte.
" Soit, mais dans la mesure où aucune parole
évangélique n'interdit de donner une place prééminente aux femmes dans la
communauté des fidèles, pourquoi n'ouvre-t-il pas cette porte ? Homosexualité
? Il considère, en se référant explicitement au Catéchisme de l'Eglise
catholique (1992) rédigé par ses deux prédécesseurs, qu'" on ne doit pas
marginaliser ces personnes qui doivent être intégrées dans la société ".
Cependant, il omet de souligner que ce même ouvrage déclare que " les actes
d'homosexualité se présentent comme des dépravations graves ",
"
intrinsèquement désordonnés ", " contraires à la loi naturelle
". Et si les homosexuels doivent " être accueillis
avec respect, compassion et délicatesse ",
"
ils ne sauraient recevoir d'approbation en aucun cas "
(§ 2 357, § 2 358).
A
priori, le pape actuel ne ferait que s'inscrire dans la continuité de Jean
Paul II et Benoît XVI, perpétuant les principes traditionnels de la morale
chrétienne. A posteriori, deux indices pourraient signifier un certain retour
au conservatisme moral pré-Vatican II.
Premier
indice, François rappelle régulièrement l'importance du combat des croyants
contre
" le diable " lors de ses homélies. On retourne
cinquante ans en arrière. Second indice : sa sortie contre le lobbying gay.
Derrière cette attaque contre le pouvoir d'influence des gays, se trouve
" le " modèle du lobbying pour la conscience catholique : la
franc-maçonnerie. Or, François, au bout de quatre mois de pontificat, remet
au goût du jour cette société secrète, alors que le droit canon de 1983 ne la
mentionne pas, pas plus que le Catéchisme de l'Eglise catholique de
1992. Le successeur de Pierre aurait-il peine à masquer sa nostalgie d'un
ordre moral disparu dans les sociétés européennes mais pas en Amérique du Sud
?
La
question se pose d'autant plus que sa communication semble performante,
conformément au dernier pilier de la casuistique. N'arrive-t-il pas à
convertir, en bon casuiste, à sa vision de l'Eglise observateurs et fidèles,
de plus en plus enthousiastes ? Pour notre part, nous attendrons la mise en
oeuvre des réformes pour nous prononcer.
Olivier
Bobineau Sociologue est l’auteur de « L’empire des papes. Une sociologie du
pouvoir dans l’Eglise » CNRS Editions 300 p. 22 €
© Le Monde
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dimanche 21 juillet 2013
Marthe et Marie, ou la grande Réparation !
Lectures :
Genèse 14,17-20 : invitation de Melkisédeq et Luc 10, 38-42 : Marthe
et Marie
·
Il y a
peu de trace de la vie de Jésus en
famille, le fils du charpentier de Nazareth ne se raconte pas et ne présente
pas sa famille comme une réalité sacrée et fermée. A contraire on perçoit
davantage la structure familiale comme une ouverture nécessaire qui ira même
jusqu’à l’affirmation élargie des frères te des sœurs qui sont ceux et celles
qui se rassemblement autour de la Parole lue et proclamée.
·
On
sait par ailleurs que le clan familial de Jésus a été particulièrement
important après sa mort et qu’il a voulu imposer et presque réussi dans l’affirmation d’une
orthodoxie liée dans un premier temps à la communauté juive de Jérusalem avec à
sa tête Jacques appelé le frère du Seigneur.
·
Le
cercle des Douze deviendra l’autre figure de la réalité familiale, et une
troisième étape est constituée par la maison de Béthanie avec Lazare, Marthe et
Marie ses sœurs selon la tradition de l’évangéliste Jean, on dirait aujourd’hui
que celui qui n’avait pas de lieu où reposer sa tête, avait l’habitude de se
poser à Béthanie, avant de reprendre sa marche sur les chemins de Galilée et de
Judée : c’était sa famille recomposée.
Le
récit de Luc, suit celui que nous avons lu dimanche dernier, le samaritain
bienveillant. On peut penser et croire que ce court récit qui culmine dans la
dernière réplique de Jésus, est une sorte de correctif, une affirmation qui
vient annoncer et dire et redire qu’il n’y a pas dans la tradition chrétienne
une seule et unique voie pour réaliser et donner un sens à sa vie. Le texte que
l’on lit après celui de ce jour, est le don de la prière, le Notre Père !
Marthe et Marthe entre le samaritain et la prière !
Il
y a toujours les actifs, les pragmatiques, ceux et celles qui sont dans le
concret et par lesquels il se passe des choses celles te ceux qui font avancer
efficacement, la réalité de la vie en train de se produire : il faut bien
agir pour vivre ; les actifs des temps anciens, de l’Antiquité sont les
plus méprisés ; faire ou travailler est associé au statut de
l’esclave ; ultérieurement le tiers état sous l’ancien régime sera le lieu
de la pratique et de la vie concrète, loin des préoccupations de la noblesse et
de clergé. Ce sont aussi parmi cette catégorie là que l’on trouve aussi non
seulement des actifs mais aussi des activistes celles et ceux qui accélèrent le
mouvement de la vie ou de l’histoire. Au temps de Jésus, nombreux sont ceux qui
veulent mettre concrètement dehors ceux qu’ils considèrent comme des
envahisseurs des occupants. Les mouvements nombreux de résistances sont à
l’œuvre et Jésus ou les premiers chrétiens devront choisir leur camp. Celui de
l’attente ou celui de l’action.
Il
y a toujours aussi les contemplatifs, les rêveurs, les intellectuels, celles et
ceux qui vivent comme on le leur dit parfois, dans un autre monde, celui des
idées, des débats des idéologies des religions, des mystiques de toutes sortes,
plus que dans la réalité ! Plus que dans la vraie vie. Il y en a qui
s’enferment volontairement dans des groupes et communautés, ils vivent selon
des règles de vie très précises,
codifiées et obéissent souvent à un chef ; il y en a aussi qui
indépendants et peu insérés socialement, vivent seul ou à quelques uns à côté
de la vie réelle, on dit qu’ils sont marginaux, il en existe de toutes
sortes : leur présence leur mode vie est une critique non violente en
général de la société dans laquelle ils se trouvent. Les grandes écoles et
leurs membres dans l’empire gréco-romains, les stoïciens, les pythagoriciens,
les cyniques, les élèves de Platon et bien d’autres faisaient partie de cette
catégorie.
Le
christianisme sera compris et va se développer en favorisant les deux modes de
vie, les deux comportements. On pourrait dire qu’il ne pourra jamais choisir et
que son originalité, sa marque spécifique sera de conjuguer absolument les deux
voies complètement reconnues et assumées.
·
Jésus
est un fils de charpentier qu’on ne voit pas souvent au travail
·
Paul
fabriquant de tentes, drapier, se prévaudra de son travail comme condition de
son indépendance
·
Les
disciples de Jésus ont laissé une activité concrète pour suivre le Maître et
son enseignement
·
Le
message de Jésus s’exprime dans un langage accessible et concret voire imagé
par exemple celui des paraboles. La dimension matérielle banale « un
semeur qui sème » est aussi le support d’une interprétation qui échappe à
la réalité racontée.
On pourrait ainsi décrire le christianisme comme une tentative de dire
à la fois les deux voies possibles. C’est d’ailleurs le judaïsme de tendance
pharisienne qui va donner l’exemple et associer les commandements dans la vie quotidienne, comment manger se
vêtir etc… avec l’idée de plaire et d’obéir à Dieu, non pas seulement de façon
spirituelle mais aussi de façon matérielle, réelle, concrète.
Nous ne sommes pas tous des samaritains ; et nous ne sommes pas
tous appelés à le devenir ; mais peut être sommes tout à la fois, légiste
ou légaliste, prêtre et samaritain. Ces personnages sont des caractères, des
orientations des aspirations qui nous composent plus qu’elles nous qualifient.
Nous ne sommes ni Marthe ni Marie ; nous ne sommes pas appelés à le
devenir ; mais plutôt à stimuler en nous ce qui dort ce qui somnole ce qui
est paresseux soit du côté de Marthe soit du côté de et cela n’est pas simple.
Nous aimons bien nous qualifier nous définir et nous enfermer dans un
rôle qui nous plaît, nous convient davantage et qui ne nous oblige pas à en
sortir. Dire à un agité qu’il est appelé aussi à la méditation n’est pas
simple. Dire à un méditatif, qui se contente de peu qu’il est aussi appelé à
agir et à produire, à consommer à s’enrichir et à agir avec d’autre, c’est bien
complexe. Oui c’est nous ne sommes pas ce que nous sommes et nous plus et autrement
que ce que nous donnons à voir et à entendre aux autres. Oui nous sommes et Marthe et Marie.
Aujourd’hui dans notre culture occidentale, européenne c’est Marthe qui
a gagné. L’action en vue de la réussite est une constante de nos sociétés.
Produire et faire valoir ce que l’on fait est devenu banal est devenu ce qui
identifie la réalité humaine. Le risque est grand chez Marthe ce se justifier
le risque est grand chez elle de se comparer avec celle qui est semble t-il
toute à son loisir tout à son écoute pour rien de l’autre qui est là.
Peut être qu’une société de samaritains serait dangereuse et n’aurait
plus grand sens ni valeur car nous serions ce que nous ferions. Un peu comme la
fourmilière qui malgré les apparences n’est pas un modèle libre et responsable
d’activités créatrices. Une communauté monastique, une communauté retirée de la
vie réelle n’est plus un modèle crédible pour la survie de l’humanité aux
prises avec des menaces constantes, internes ou externes.
La relation à l’autre comme la relation au Christ ou à Dieu se vit
comme une hospitalité. J’accueille celui par qui je me laisse accueillir.
L’hospitalité ne regarde pas à côté et ailleurs, elle ne jalouse pas, elle
trouve son sens en elle-même. Il y a sans doute un temps pour tout sous le
ciel. Ici avec Marthe et Marie après l’épisode du samaritain, l’écoute celle de
la Parole du Maître est essentielle, centrale, première.
·
Les
temps personnels de la lecture biblique de la méditation et de la prière
restent des bornes des passages obligés chers aux Réformateurs. Ces temps sont
nécessaires et ils sont la marque de nos personnalités et de nos libertés sans
soumission à un autre ou à une Eglise, car ici l’obéissance est celle rendue à
Dieu directement en son Esprit.
·
Le
Talmud décrit la réalité du Tikoun, (Rabi Nahman
de Breslev) c’est le temps de la
Réparation. Au fond la création n’est pas si bonne qu’on veut bien le dire et le croire. Il y a
des imperfections il y a des réalités à changer modifier réparer. C’est notre
travail, si cela a du sens pour nous cela peut devenir notre œuvre et pour cela
nous avons à notre disposition quelques outils bien utiles et identifiés et mis
à notre disposition. Ce qui va réparer, non pas changer le monde non pas
changer de monde mais réparer celui que nous connaissons bien, ce sont Marthe
sans Marie et Marie sans Marthe. C’est le samaritain sans le légiste et le
prêtre, sans Marthe et Marie.
Participer au Tikoun c’est découvrir ce qui en moi n’était pas évident,
Marthe et Marie, ou Abram en train d’inviter un inconnu nommé Melkisédeq.
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